Rapport annuel Cour des comptes 2011

 

 

 CD ROM Annuaire d'Entreprises France prospect (avec ou sans emails) : REMISE DE 10 % Avec le code réduction AUDEN872

10% de réduction sur vos envois d'emailing --> CLIQUEZ ICI

Retour à l'accueil, cliquez ici

COUR DES COMPTES Synthèses 2011 C es synthèses sont destinées à faciliter la lecture et l’utilisation du rapport de la Cour des comptes. Seul le rapport engage la Cour des comptes. Les réponses des administrations et autres organismes intéressés sont insérées dans le rapport. Avertissement Le rapport public annuel1 La trajectoire 2010-2013 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .9 2 Les dépenses fiscales : un enjeu budgétaire majeur . . . . . . . . . . . . . .12 3 Quelques dépenses fiscales consacrées au développement des entreprises et de l’emploi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .15 4 La prime pour l’emploi : une dépense fiscale aux objectifs de plus en plus confus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .18 5 Le Fonds de réserve des retraites : une ambition abandonnée, une réorientation risquée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .21 6 Le système français d’indemnisation du chômage partiel : un outil insuffisamment utilisé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .24 7 La campagne de lutte contre la grippe A(H1N1) : bilan et enseignements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .26 8 Le système de santé en Polynésie française et son financement . . . .28 9 Le soutien public aux entreprises exportatrices . . . . . . . . . . . . . . . .30 10 La compensation des charges du service public de l’électricité . . .32 11 Les pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES) : un second souffle nécessaire…………………………………....…34 12 L’agence nationale de la recherche : premiers constats et perspectives……………………………………………………….36 3 Synthèses du tome 1 : Les observations des juridictions financières 3 sommaire Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes4 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Sommaire 13 Les flux migratoires irréguliers en Guyane, à Mayotte et à Saint-Martin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .39 14 La gestion des risques naturels dans les départements d’outre-mer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .42 15 La politique de soutien à l’agriculture des départements d’outre-mer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .45 16 Un premier bilan des externalisations au ministère de la défense…48 17 La gestion du domaine skiable en Rhône-Alpes . . . . . . . . . . . . . . .51 18 La continuité territoriale avec la Corse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .53 19 Les ouvriers d’Etat du ministère chargé de l’équipement et de l’aviation civile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .55 20 Le “quart de place” des militaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .58 21 Les particularités des rémunérations des réservistes militaires . . . .61 22 La SOVAFIM : un intervenant sans utilité réelle . . . . . . . . . . . . . . .62 23 Le nouveau siège de l’Office Paris Habitat . . . . . . . . . . . . . . . . . . .63 24 Les exonérations des indemnités versées aux arbitres et juges sportifs : un instrument inadapté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .65 25 Le musée national du sport : un projet mal suivi . . . . . . . . . . . . . .685 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Sommaire I - La Cour constate 26 Les services publics d’eau et d’assainissement : des évolutions encourageantes…………………………………………………...72 27 Les organismes faisant appel à la générosité publique.……………74 28 La « décristallisation » des pensions des ressortissants des territoires autrefois sous souveraineté française…………………..…………76 29 Les autorités de régulation financière………………………..……77 30 Les services centraux chargés de l’outre-mer……………………...78 31 Le Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM)………80 32 Le personnel du contrôle de la navigation aérienne………………82 II - La Cour insiste 33 Le CNRS dans le nouveau paysage de la recherche…………….…83 34 La préparation et le suivi de l’exécution du budget de l’Etat…...…85 35 Les effets de la certification des comptes de l’Etat……………..…86 36 Les mesures législatives concernant la sécurité sociale et les retraites…………………………………………………….……..88 Synthèses du tome 2 : Suites données aux observations des juridictions financièressommaire 37 La Coface......……………………………………………………..89 38 La réorganisation de la collecte de la taxe d’apprentissage dans le secteur des transports et de la logistique …………………………90 39 Le GIP Habitat et interventions sociales pour les mal-logés et les sans-abri………………………… .………………………………92 40 L’Ecole nationale de la voile et des sports nautiques..........................93 III - La Cour alerte 41 Chorus et les systèmes d’information financière de l’Etat………....95 42 Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT)..........………………………………………...98 43 Le Grand port maritime de Marseille : blocage social et déclin…...99 44 Les agences comptables des lycées et collèges publics…………...102 45 L’Etablissement public d’insertion de la défense (EPIDe) ……....103 46 La participation de la France aux corps militaires européens permanents…..…………………………………………….…....104 6 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes7 Synthèses du tome 1 Les observations des juridictions financières9 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 1 La trajectoire 2010-2013 Un redressement fort et rapide des comptes publics est indispensable pour retrouver une croissance durable, pré- server la capacité d’intervention de l’Etat et maintenir la confiance. Il doit faire l’objet d’une programmation pré- cise et crédible. La Cour a examiné si les comptes publics suivent la trajectoire décrite dans les lois de programmation des finances publiques et si les mesures retenues par le Gouvernement pour ramener le déficit public de 7,7 % du PIB en 2010 à 3,0 % du PIB en 2013 sont suffisantes. Une aggravation du déficit structurel en 2010 Le déficit public a fortement dévié en 2010 de la trajectoire prévue par la première loi de programmation, adoptée début 2009 pour les années 2009 à 2012, du fait de la crise, mais aussi parce que la maîtrise des dépenses a été insuffisante et parce que les règles instaurées par cette loi de programmation n’ont pas été respectées. Hors effets de la crise, plan de relance et autres opérations exceptionnelles, la croissance des dépenses publiques a été de 1,4 % en volume en 2010. Elle a été inférieure à la moyenne des dix dernières années (2,3 %), mais supérieure à l’objectif de moyen terme de la première loi de programmation (1,0 %) et trop forte pour contribuer à réduire le déficit structurel. Au contraire, celui-ci, qui atteignait déjà 5,0 % du PIB en 2009, a été aggravé par des baisses durables des prélèvements obligatoires, à hauteur de 0,3 % du PIB, qui ne respectaient pas les règles de la loi de programmation. Des objectifs et des règles plus ambitieux pour la programmation 2011-2014 Comme la Cour l’avait recommandé, les règles établies par la deuxième loi de programmation, du 28 décembre 2010, pour les années 2011 à 2014 imposent désormais, chaque année, un effort structurel de réduction du déficit public en plafonnant les dépenses et en fixant un rendement minimal pour les hausses des prélèvements obligatoires. La portée de ces règles présente toutefois des limites : en particulier, des lois de finances ou des lois ordinaires peuvent remettre en cause les dispositions des lois de programmation, comme l’a montré la baisse de la TVA sur la restauration. De profondes réformes restent nécessaires pour atteindre les objectifs d’évolution des dépenses publiques. Cour des comptesLa trajectoire 2010-2013 10 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Un effort structurel insuffisant en 2011 La croissance des dépenses prévue par le Gouvernement pour 2011 est encore de 1,4 % en volume, hors facteurs conjoncturels ou exceptionnels. Ce ralentissement par rapport à la tendance des dix dernières années suppose de réaliser environ 13 Md€ d’économies sur les dépenses, hors charges d’intérêt de la dette, mais celles qui ont été identifiées par la Cour ne s’élèvent qu’à environ 5 Md€. Même si la croissance des dépenses est de 1,4 % en 2011, ce qui reste possible, elle sera supérieure à l’objectif de la loi de programmation pour 2011-2014 (0,8 %) et encore trop forte pour contribuer à réduire significativement le déficit structurel. L’effort structurel de réduction du déficit résultera seulement des mesures de hausse des prélèvements obligatoires, qui augmenteront les recettes de 10 Md€ en 2011 (0,5 % du PIB). Certaines n’ont cependant qu’un effet temporaire et le rendement des mesures pérennes est de 7,5 Md€. Cet effort structurel marque une nette inflexion de la politique budgé- taire, mais il est encore loin de l’effort de 20 Md€ que la Cour avait recommandé de réaliser chaque année à partir de 2011, dans son rapport de juin 2010 sur la situation et les perspectives des finances publiques, pour stabiliser puis réduire rapidement la dette publique. La diminution de 1,7 point de PIB du déficit prévue par le gouvernement pour 2011 tient, pour une plus grande part, à la disparition de mesures exceptionnelles ou temporaires (plan de relance, surcoût ponctuel en 2010 de la réforme de la taxe professionnelle notamment, Elle repose aussi sur une hypothèse favorable (2,0 %) de croissance du PIB. Au-delà de 2011, des mesures de redressement à définir Les objectifs de dépenses et de recettes retenus dans la loi de programmation à partir de 2012 représentent un effort structurel de réduction du déficit d’environ 0,65 point de PIB chaque année, ce qui reste, à nouveau, inférieur au montant d’un point de PIB recommandé par la Cour. De plus, il est très difficile d’identifier, dans les documents accompagnant la loi de programmation et les projets de réforme du Gouvernement, les mesures de hausse des prélèvements obligatoires et de réduction des dépenses qui permettraient de réaliser cet effort. Comme dans les programmes de stabilité déposés par la France depuis 12 ans et comme dans la loi de programmation pour 2009-2012, les mesures de redressement sont très peu documentées audelà de la première année de programmation.La trajectoire 2010-2013 11 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Or, l’analyse de certains postes montre que l’évolution des dépenses prévue par le gouvernement exige de mettre en œuvre des réformes beaucoup plus ambitieuses que celles déjà annoncées. Dans un rapport de septembre 2010 sur la masse salariale de l’Etat, la Cour a ainsi souligné que sa seule stabilisation en valeur, alors même que le budget triennal prévoit une baisse de 2010 à 2013, supposerait de geler la valeur du point de la fonction publique jusqu’à fin 2013 et de plafonner beaucoup plus strictement les mesures catégorielles. La croissance du PIB et des recettes publiques pourrait enfin être inférieure aux prévisions retenues dans la loi de programmation, ce qui rendrait plus difficile de ramener le déficit à 3,0 % du PIB en 2013. Pour que la trajectoire décrite par la loi de programmation des finances publiques soit totalement crédible, l’effort structurel doit être plus ambitieux et les mesures nécessaires pour le réaliser doivent être rapidement précisées.2 Les dépenses fiscales : un enjeu budgétaire majeur L’expression « dépenses fiscales » désigne des dispositions législatives dérogatoires, par rapport à une norme fiscale de référence, qui entraînent une perte de recettes pour l’Etat. En pratique, la frontière, pour un impôt ou une taxe donné, entre ce qui doit être considéré comme une dérogation et ce qui peut être tenu pour une simple modalité d’application de la règle donne souvent lieu à discussion. Un coût élevé et fortement croissant Après avoir été assez stable de 2000 à 2004, le nombre des dépenses fiscales recensées en annexe des lois de finances est passé d’environ 400 à 500 de 2004 à 2009 et leur coût total a augmenté de 43 %. Le coût des dépenses fiscales figurant sur la liste officielle a ainsi atteint 68 Md€ en 2009, hors mesures de relance, soit 30 % des recettes fiscales nettes de l’Etat. Ce ratio était de 18 % en 2004, et, s’il avait été maintenu à ce niveau, le déficit budgétaire aurait été moindre de 27 Md€ en 2009. Par ailleurs, le coût en 2009 des dispositifs retirés de la liste des dépenses fiscales depuis 2004 s’élève à 75 Md€. Cette forte croissance du coût des dépenses fiscales à partir de 2004 coïncide avec la mise en œuvre d’une norme de croissance « zéro volume » des dépenses budgétaires de l’Etat. En outre, le coût des réductions et crédits d’impôt, qui sont les dépenses fiscales les plus substituables à des dépenses budgétaires, s’est accru de 142 % de 2004 à 2009. La création et l’extension de certaines dépenses fiscales ont permis de contourner les règles budgétaires. Une notion floue, des coûts mal connus Il n’existe pas de définition de la « norme fiscale de référence » en France, ni a fortiori des mesures qui peuvent être considérées comme dérogatoires. La liste des dépenses fiscales donnée en annexe des projets de loi de finances manque fortement de cohérence. Ainsi, beaucoup de mesures de suppression ou réduction de dépenses fiscales présentées par le Gouvernement dans le projet de loi de finances pour 2011 concernent en réalité des dispositifs qui n’ont jamais figuré sur cette liste ou qui en ont été retirés récemment. La Cour souhaite que les dépenses fiscales fassent l’objet d’une définition précise et que leur liste soit revue en conséquence. Leur coût, tel qu’il est présenté dans les documents budgétaires, doit être interprété avec précaution, d’abord parce qu’il est souvent supérieur aux recettes qui seraient obtenues si elles étaient supprimées. En effet, il est estimé sans tenir compte des changements de comportement, souvent Cour des comptes Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 1213 Les dépenses fiscales : un enjeu budgétaire majeur Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes impossibles à quantifier précisément, qui pourraient résulter de cette suppression. Ensuite, les informations disponibles peuvent être insuffisantes pour chiffrer correctement ce coût. Il correspond enfin à la perte de recettes par rapport à ce qui serait résulté de l’application d’une norme de référence, mais celle-ci n’est pas explicitée et peut varier d’une année à l’autre. La Cour souhaite que le chiffrage du coût des dépenses fiscales soit amélioré. Prévoir l’évolution de ce coût est certes encore plus délicat mais le ministère des finances sous-estime fortement sa croissance en se contentant de reconduire le dernier coût constaté pour plus de la moitié des dépenses fiscales. Dans l’attente qu’une méthode plus fiable puisse être mise en œuvre, la Cour recommande de faire évoluer le coût d’une dépense fiscale comme le produit de l’impôt concerné ou comme le PIB en valeur. Des règles encore peu contraignantes La loi de programmation pour les années 2009 à 2012 avait prévu une règle de gage selon laquelle les créations et extensions de dépenses fiscales devaient être compensées, pour chaque année, par des réductions et suppressions d’un montant global équivalent. Cette règle n’a été respectée ni en 2009 ni en 2010, et les mesures adoptées depuis le dépôt de cette loi de programmation ont contribué à augmenter de 1,9 Md€ le coût des dépenses fiscales en 2010. La nouvelle loi de programmation, adoptée en décembre 2010 pour les années 2011 à 2014, fixe, pour chaque année, le rendement minimal des mesures nouvelles de hausse des prélè- vements obligatoires, qui peuvent prendre la forme d’une réduction des dépenses fiscales. Au surplus, elle encadre plus particulièrement les dépenses fiscales en prévoyant que leur coût total en valeur ne doit pas augmenter. Compte tenu du niveau déjà atteint et de la situation des finances publiques, il faudrait toutefois viser une forte baisse de ce coût plutôt qu’une simple stabilisation. Dans son rapport de juin 2010 sur la situation et les perspectives des finances publiques, la Cour avait recommandé de le diminuer de 10 Md€, et d’autant celui des niches sociales. Les mesures adoptées en loi de finances pour 2011 réduiront le coût des dépenses fiscales de la liste officielle de seulement 0,5 Md€ en 2011, et il restera supérieur de 7 % au montant atteint en 2008. L’effet de certaines mesures sera toutefois différé au-delà de 2011 et le rendement attendu en 2012 est de 2,4 Md€. En y ajoutant les mesures relatives aux dispositifs qui ne figurent pas sur la liste des dépenses fiscales, mais qui sont très semblables, l’impact total sur les comptes publics serait de 4,3 Md€ en 2011 et de 6,2 Md€ en 2012. Ce dernier montant est encore assez éloigné de l’objectif de 10 Md€ recommandé par la Cour. L’effort de réduction du coût des dépenses fiscales doit donc être poursuivi.14 Recommandations Les dépenses fiscales : un enjeu budgétaire majeur Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes préciser la définition des dépenses fiscales donnée en annexe des projets de loi de finances et en revoir la liste en conséquence ; en étendre le champ aux impôts affectés à d’autres organismes publics ; améliorer le chiffrage de leur coût et, quand aucune méthode de pré- vision n’est fiable, ne plus le reconduire d’une année à l’autre, mais le faire évoluer comme le produit de l’impôt concerné ou comme le PIB ; remplacer, dans la prochaine loi de programmation, le gel du coût total des dépenses fiscales par une disposition imposant de prendre des mesures de suppression ou de réduction de dépenses fiscales dont le rendement total soit supérieur à un montant minimum ; étendre le « coup de rabot » au moins à l’ensemble des réductions et crédits d’impôt sur le revenu ; mener à bien l’évaluation systé- matique des dépenses fiscales prévue par la précédente loi de programmation et en tirer les conséquences dans le projet de loi de finances pour 2012 ; appuyer cette révision des dépenses fiscales sur les travaux de la Cour, qui en ont souvent montré l’incohérence et le coût disproportionné au regard des résultats obtenus.15 Cour des comptes Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 3 Quelques dépenses fiscales consacrées au développement des entreprises et de l’emploi Les dépenses fiscales profitant aux entreprises et à l’emploi ont un impact économique difficile à mesurer, d’autant qu’elles s’inscrivent dans un mouvement de profondes réformes de la fiscalité des entreprises, qui ont contribué à améliorer l’environnement dans lequel ces dernières évoluent. Elles doivent être d’autant plus suivies que les entreprises savent les utiliser rapidement et de manière optimale. Leur coût en est accru et les effets d’aubaine sont importants. Une attention toute particulière devrait être portée au suivi de l’évolution des coûts de certains dispositifs, ce qui pourrait conduire à la remise en cause, totale ou partielle, de certains d’entre eux, sans que cela nuise à l’équilibre de l’imposition des entreprises en France. Un coût réel des dépenses fiscales souvent plus élevé que son évaluation initiale L’évaluation des dépenses fiscales qui concernent les entreprises ainsi que des mesures considérées comme des modalités de calcul de l’impôt (programme 134 de la loi de finances) n’est pas satisfaisante. De manière générale, les premières évaluations du coût des dépenses fiscales propres aux entreprises se révèlent inférieures au coût réel résultant de leur mise en œuvre effective. Les évaluations des principales dépenses fiscales mises en place dans la période récente illustrent la difficulté de fournir au Parlement une information fiable sur laquelle il sera possible de s’appuyer pour décider de leur instauration, tellement les différences constatées peuvent être grandes. Ces différences peuvent s’expliquer par l’application de règles d’évaluation conventionnelles, par une sous-estimation du nombre des bénéficiaires et par la réactivité des entreprises, qui mettent en œuvre rapidement les mesures nouvelles, à des fins d’optimisation fiscale. Des enjeux budgétaires des dépenses fiscales propres aux grands groupes insuffisamment pris en compte Le régime de l’intégration fiscale, dont le coût budgétaire est évalué à près de 20 Md€, est particulièrement attractif. Il offre de compenser les résultats défi-Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Quelques dépenses fiscales consacrées au développement des entreprises et de l’emploi citaires et bénéficiaires des sociétés membres ou de déduire les frais financiers sans réelle limitation. Les conditions d’application sont très favorables. Il permet de nombreuses possibilités de neutralisation d’opérations internes au groupe. Les neutralisations conduisent, année après année, à des diminutions des bénéfices imposables des groupes par rapport à ceux qui résulteraient de la simple compensation des résultats déficitaires et bénéficiaires, représentant à elles seules un coût de plus de 2,3 Md€. Certaines voies pourraient être explorées pour limiter le coût de ce régime, sans remettre en cause le principe fondamental de compensation des résultats bénéficiaires et déficitaires des sociétés d’un même groupe. Le régime du bénéfice consolidé au plan mondial permet à un groupe international de déterminer son résultat imposable en France, en compensant les résultats bénéficiaires et déficitaires des sociétés filiales détenues à au moins 50 % et des établissements implantés à l’étranger. Ce régime optionnel peut être très favorable. S’il a eu, sans aucun doute, son utilité pour aider le développement international des plus grands groupes industriels français, ce n’est plus le cas aujourd’hui, dans un environnement où les entreprises réalisent une part significative de leurs bénéfices à l’étranger. Sa suppression pourrait être examinée. Un recours au PEA permettant de soustraire d’importantes plus-values à l’impôt Le régime fiscal du plan d’épargne en actions (PEA) a été institué pour inciter les contribuables à investir, de manière durable, leur épargne dans des titres de sociétés, en leur permettant de bénéficier d’une exonération d’impôt sur le revenu sur les dividendes et d'impôt sur les plus-values réalisées. L’élargissement des PEA aux titres de sociétés non cotées a conduit à des pratiques d’optimisation importantes et même à des abus. Le procédé consiste à inclure dans un PEA des titres de socié- tés non cotées pour des valeurs unitaires inférieures à leur véritable valeur, afin de porter sur le plan, pour la même somme plafonnée, le plus grand nombre possible de titres, pour bénéficier d’une exonération de plus-values, dont les montants sont sans commune mesure avec ceux qu’il est possible de constater lorsque ces plus-values sont réalisées dans le cadre d’une épargne domestique. Un dispositif anti-abus pourrait être mis en place pour limiter l’exonération des plus-values. 1617 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Quelques dépenses fiscales consacrées au développement des entreprises et de l’emploi Recommandations ne pas requalifier trop rapidement une dépense fiscale en modalités de calcul de l’impôt, de façon à ne pas s’interdire à l’avenir de s’interroger sur la pertinence de la mesure et la nécessité de son maintien ; anticiper, lors de l’élaboration des lois de finances, la forte réactivité des entreprises aux nouvelles mesures, afin de mieux évaluer leurs coûts et de limiter leur application effective aux seules situations répondant aux objectifs définis par la loi ; évaluer les dépenses fiscales qui correspondent aux neutralisations d’opérations intra-groupes, prévues par le régime fiscal de groupe ; étudier les conséquences de la suppression du régime du bénéfice consolidé au plan mondial, qui semble ne plus répondre à une exigence économique ; instaurer un mécanisme antiabus, pour limiter le montant des exonérations de plus-values réalisées lors de la cession de titres de sociétés non cotées inscrits sur un PEA, comme cela est le cas pour limiter l’exonération des dividendes.4 La prime pour l’emploi : une dépense fiscale aux objectifs de plus en plus confus La prime pour l’emploi (PPE) instaurée par la loi du 30 mai 2001 vise, selon les termes du code général des impôts, à inciter à la reprise ou à la poursuite d’une activité professionnelle. Elle est calculée sur les seuls revenus du travail et est attribuée au foyer fiscal pour chaque personne exerçant une activité professionnelle. Son montant est croissant pour un revenu compris entre 0,3 et 1 SMIC, puis décroissant jusqu'à 1,4 SMIC. Sa diffusion est large : près d’un foyer fiscal sur quatre en bénéficie (8,2 millions de bénéficiaires en 2009) pour un montant moyen d’environ 500 € par an. Le coût de la mesure pour l’Etat a presque doublé entre 2001 et 2009, passant de 2,5 à plus de 4 Md€ Une mesure ambiguë poursuivant plusieurs objectifs La PPE poursuit une pluralité d’objectifs (retour à l’activité, complément de revenu, rééquilibrage de la fiscalité des revenus, accompagnement de la modération du SMIC). Les nombreux aménagements introduits année après année, ajoutés à la multiplication des autres dispositifs d’incitation à la reprise d’activité, l’ont brouillé davantage. La PPE peut être versée à des ménages dont les revenus se situent nettement au-dessus de la moyenne, mais, à l’inverse, elle exclut les personnes en situation précaire au regard de l’emploi. Cette absence de ciblage ne lui permet pas d’avoir un véritable effet incitatif au retour à l’emploi, son montant restant insuffisant, malgré le doublement de son coût global. Créé en décembre 2008 avec des objectifs a priori similaires, le RSA « activité », tant par son montant que par le nombre de ses béné- ficiaires, ne remet pas en cause ce constat. Les défaillances du pilotage stratégique et budgétaire La PPE n’est pilotée ni par les directions des ministères chargées du budget et des finances, ni par la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP). Une lourde incertitude, représentant depuis trois années un quart du montant annoncé, affecte l’estimation de son coût pour le budget de l’Etat. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 18Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 19 Des améliorations ont pourtant été apportées à la gestion des déclarations de revenu, facilitée par de nombreuses innovations (déclarations pré-remplies, processus de relance, certification des contribuables). Connue des contribuables, la PPE est une prestation simple à obtenir. La procédure fiscale permet de toucher la plupart des ayantsdroit qui n’ont aucune démarche spécifique à accomplir. Néanmoins, des fraudes persistantes rendent indispensable un contrôle fiscal adapté au nombre élevé des bénéficiaires et à la faiblesse des montants de chaque prime. La nécessité d’un choix politique quant à l’objectif de la mesure et à son articulation avec le RSA « activité » Si l’objectif réaffirmé pour la PPE est celui du retour à l’emploi, il est nécessaire de majorer son montant de façon à le rendre véritablement incitatif et d’en déplacer la cible vers les bénéficiaires dont le revenu d’activité est insuffisant pour les inciter naturellement à reprendre un emploi. La réduction du nombre de bénéficiaires qui en résulterait permettrait d’accroître le montant de la prime, sans augmenter la dépense globale. Il conviendrait alors d’absorber le RSA « activité » dans la PPE, dont la simplicité de versement lui donne un caractère plus nettement incitatif que le RSA, dont l’administration est complexe à administrer. Si la transformation de la PPE aux dépens du RSA « activité » n’est pas retenue, deux autres voies peuvent être envisagées : - la suppression de la PPE : le RSA « activité » resterait alors la mesure unique assurant un revenu aux travailleurs modestes pour les inciter à reprendre une activité ; - le maintien des deux mesures : il conviendrait alors que leurs objectifs soient clairement différenciés. Le RSA « activité » serait la mesure d’incitation à la reprise d’activité, la PPE devenant un revenu complémentaire pour les actifs aux ressources modestes. Dans ce cas, la PPE devrait être aménagée de façon à tenir compte davantage de la situation familiale des bénéficiaires. La prime pour l’emploi : une dépense fiscale aux objectifs de plus en plus confus 19La prime pour l’emploi : une dépense fiscale aux objectifs de plus en plus confus Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 20 Recommandations Dans l’hypothèse d’un maintien de la PPE : désigner un véritable chef de file assurant le pilotage stratégique, choisi en fonction de l’objectif retenu, revenu ou activité ; sécuriser le mode d’enregistrement de l’ensemble des dépenses fisclaes liées à l’impôt sur le revenu, étape indispensable à la mise en place d’une mesure de la performance ; présenter de manière cohérente le coût total de la dépense fiscale, le montant des déductions d’impôt et celui des restitutions sous la forme de prime ; mettre en place un contrôle a priori et sélectif de certaines déclarations choisies pour les anomalies qu’elles présentent ; faire figurer sur les déclarations pré-remplies les horaires travaillés, dans l’hypothèse où la mesure reste une incitation à l’activité ; améliorer les procédures de relance des contribuables potentiellement éligibles à la PPE ; mettre un terme aux paiements par lettres chèques et aux versements en numéraire et ainsi aller vers la géné- ralisation du paiement par virement bancaire.Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 5 Le Fonds de réserve des retraites (FRR) : une ambition abandonnée, une réorientation risquée Le Fonds de réserve des retraites (FRR) a été créé en 1999 afin de constituer une réserve, conçue, à l’origine, pour atteindre 150 Md€ et destinée à contribuer, à partir de 2020, au financement des régimes de retraite des travailleurs salariés et des professions artisanales, industrielles et commerciales. Le Fonds représentait un instrument nouveau en France, incarnant la volonté de l’Etat de se fixer des ambitions de long terme. Il devait être alimenté annuellement par des abondements divers (excé- dents de la Caisse nationale d’assurance vieillesse ou du Fonds de solidarité vieillesse, produits des privatisations, taxes, notamment, et produits financiers des investissements réalisés par l’établissement sur les marchés. Une ambition abandonnée En juin 2010, les missions du FRR ont été profondément modifiées, le Gouvernement ayant annoncé qu’il entendait utiliser ses ressources pendant la période de montée en charge de la réforme des retraites. Le Fonds, dont l’actif se montait, au 1er novembre 2010, à 36,2 Md€, devra désormais verser annuellement, dès 2011 et jusqu’en 2024, un montant de 2,1 Md€ courants à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES), cette dernière recevant, en outre, les dotations et transferts de taxes précédemment attribuées à l’établissement. Des résultats inférieurs aux attentes après six ans La performance annualisée (3,1 %) de juin 2004 à fin 1010 se situe en deçà du coût des emprunts de l’Etat (3,45 %) sur la même période, ce qui signifie que, pour la période considérée, il en est résulté une augmentation de la dette publique. Il est vrai que cette performance médiocre ne porte que sur les six premières années d’un fonds conçu et géré comme un investisseur de long terme, après une crise des marchés financiers de très grande ampleur. La Cour a, toutefois, constaté que la crise n’était pas le seul facteur susceptible d’expliquer le résultat constaté. Elle a relevé que l’Etat n’avait donné aucune orientation stratégique au FRR lui permettant d’être guidé par des objectifs stables et précis ; il a, au contraire, contribué à placer le Fonds dans un environnement instable en envisageant à plusieurs reprises de prélever tout ou partie des ressources de l’établissement, 21Le Fonds de réserve des retraites : une ambition abandonnée, une réorientation risquée et en diminuant régulièrement le montant annuel des dotations versées (5,5 Md€ en 2002, 1,5 Md€ en 2010). De plus, la politique d’investissement du Fonds n’a pas été totalement adaptée : les placements sur les marchés financiers ont été réalisés en période de cours élevés, avec une forte proportion d’actions. Sa réactivité à la crise financière a été insuffisante. Une réorientation risquée Le changement de nature du FRR présente des risques sérieux. Il avait, en effet, bâti sa stratégie financière sur le fait qu’il était un investisseur de long terme et pouvait donc prendre des risques, les pertes éventuelles se lissant sur la durée. Les conditions nouvelles de raccourcissement de dix ans de l’horizon de son passif réduisent les chances du Fonds de retrouver une performance annualisée satisfaisante, faute de pouvoir pratiquer sur le long terme, une politique d’investissement lui permettant de saisir les opportunités offertes par les marchés financiers. Le choix de court terme qui a été opéré présente un risque : les réserves constituées par le FRR manqueront si les déficits des régimes de retraite persistent au-delà de 2020. Une gestion à améliorer La situation du FRR requiert, en tout état de cause, une amélioration de sa gouvernance et de sa gestion. La Cour recommande une clarification des rôles entre le conseil de surveillance et le directoire, et un rôle plus actif du comité d’audit de l’établissement. Elle souligne, de plus, que des progrès sont nécessaires en matière de gestion administrative qui, confiée par la loi à la Caisse des dépôts et consignations, est perfectible tant du point de vue des coûts que des prestations. La Cour recommande aussi que le FRR examine les conséquences à tirer des transformations en cours sur le degré d’externalisation de ses activités. La loi dispose que les placements financiers s’effectuent à travers des sociétés financières mandataires dont le coût a été élevé et dont l’utilité apparait moins pertinente avec la forte diminution du portefeuille d’actions. Cette obligation d’externalisation pourrait être totalement ou partiellement remise en cause. Le FRR devrait alors examiner les conséquences de cette réorganisation sur son statut et ses modes de gouvernance. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 2223 Le Fonds de réserve des retraites : une ambition abandonnée, une réorientation risquée Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes préserver, s’agissant de l’Etat, un cadre permettant au FRR de gérer son portefeuille avec un horizon de passif stabilisé ; mettre à l’étude la possibilité, pour le FRR, de remettre en cause l’obligation d’externaliser la gestion financière de son portefeuille et celle visant à confier à la Caisse des dépôts tout ou partie de la gestion financière des actifs concernés ; examiner les conséquences à tirer de cette réorganisation sur le statut de l’établissement et sur ses modes de gouvernance ; poursuivre l’amélioration de la gestion interne, notamment en matière comptable. Recommandations6 Le système français d’indemnisation du chômage partiel : un outil insuffisamment utilisé Le chômage partiel a été l’un des principaux outils mobilisés en Europe pour faire face à la crise économique. Cette mesure d’aménagement du temps de travail permet à un employeur de réduire le temps de travail de ses salariés en cas de baisse temporaire de son activité sans rompre son contrat de travail. Durant les périodes non travaillées, la rémunération des salariés est prise en charge, partiellement ou totalement, par les pouvoirs publics (l’Etat en France, l’assurance chômage en Allemagne). Le chômage partiel est ainsi pour les salariés un outil de sécurisation de leur situation professionnelle et, pour les entreprises, un instrument de préservation de leurs capacités productives. La réactivation limitée d’un système tombé en désuétude Au cours des deux dernières années, le dispositif français de chômage partiel a connu une forte montée en puissance. Largement tombé en désuétude dans les années 2000, il a été réactivé quand la crise est survenue. Toutefois, la comparaison européenne à laquelle la Cour a procédé, notamment avec l’Allemagne, l’Italie et la Belgique, révèle que l’intensité de sa mobilisation a été nettement moins importante que dans certains pays voisins. Ainsi, l’Allemagne a compté jusqu’à 1,53 million de salariés en chômage partiel au plus fort de la crise (2 ème semestre 2009), alors que la France n’en comptait à la même date que 275 000. Les sommes consacrées au chômage partiel dans les deux pays rendent compte de cette différence : alors que le coût de ce dispositif pour les finances publiques s’est élevé à 610 M€ en France pour 2009, il est estimé à 6 Md€ en Allemagne au cours de la même année. De même, la part de la population salariée concernée par le chômage partiel a été nettement plus faible en France qu’en Belgique ou en Italie. L’économie française a ainsi moins tiré partie du chômage partiel que d’autres comme l’Allemagne ou l’Italie. Les retombées en termes de maintien dans l’emploi apparaissent de fait modestes : selon une étude de l’OCDE, le chômage partiel a contribué à la sauvegarde de 251 000 emplois en Allemagne durant la crise, pour 124 000 en Italie et seulement 18 000 en France. Par ailleurs, l’utilisation des périodes de chômage partiel à des fins de formation des salariés, difficile à mettre en œuvre, est restée marginale. Cour des comptes Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 2425 Le système français d’indemnisation du chômage partiel : un outil insuffisamment utilisé Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Les raisons d’une sousutilisation en France du régime du chômage partiel La relative sous-utilisation en France du régime du chômage partiel apparaît tenir à plusieurs causes : - l’obsolescence du dispositif lorsque la crise a éclaté : les principaux paramètres du système (notamment les taux des aides aux entreprises et le niveau de rémunération garanti aux salariés) n’avaient plus été revus, pour certains, depuis la précédente crise en 1993. Le dispositif a dû être rénové dans l’urgence à la fin de 2008, avec dans un premier temps la mise à jour de l’existant, puis la création en 2009 d’un nouveau système, dit d’ « activité partielle de longue durée ». Ce dernier comporte une hausse des rémunérations de remplacement versées aux salariés ainsi qu’une augmentation de l’aide aux entreprises, grâce notamment à l’intervention de l’assurance chômage qui s’est engagée à participer à son financement. Mais l’ « activité partielle de longue durée » n’a pu entrer en vigueur qu’une fois passé le pic de la crise, ce qui peut expliquer, dans une certaine mesure, la faiblesse de la mobilisation du chômage partiel en France ; - des facteurs structurels liés à certaines spécificités de l’économie et du marché du travail : le chômage partiel concerne pour plus de 80% des emplois industriels. La part de ces derniers étant plus faible en France (20 % de la population active) qu’en Allemagne (25 %) ou en Italie (28 %), le chômage partiel y a logiquement concerné un public moins vaste. L’évolution de la législation applicable au marché du travail en France à partir de la fin des années 1990 a renforcé les instruments de flexibilité externe (contrats à durée déterminée ou travail temporaire) et introduit de nouvelles modalités d’aménagement du temps de travail, notamment la possibilité de l’annualiser pour adapter le rythme de travail à l’activité ; ces souplesses d’organisation ont pu éviter, au moins dans un premier temps, un recours au chômage partiel ; - l’insuffisance des incitations pour les entreprises : en effet, si l’indemnisation des salariés en chômage partiel est plutôt plus favorable en France qu’à l’étranger, notre système est en revanche moins favorable qu’ailleurs pour les employeurs qui gardent à leur charge, dans les cas les plus courants, un quart et potentiellement jusqu’à la moitié de l’indemnisation des salariés, soit un niveau significativement supérieur à celui observé chez nos voisins, notamment en Allemagne ou en Italie. améliorer l’attractivité du dispositif ; simplifier son cadre juridique ; renforcer des incitations visant à combiner chômage partiel et formation. Recommandations7 La campagne de lutte contre l’épidémie de grippe A(H1N1) : bilan et enseignements Dans le but de contribuer à une meilleure réponse des autorités publiques en cas de nouvelle crise sanitaire nationale, la Cour présente ici les principales observations qu’elle a formulées à la suite de deux enquêtes conduites à la demande des commissions compétentes, du Sénat sur l’utilisation des moyens publics dans la campagne antigrippale de 2009, et de l’Assemblée Nationale sur le rôle imparti à l’Etablissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) créé en 2007. Un dispositif nouveau de gestion de crise décevant Cette campagne a constitué la première mise à l’épreuve, face à un risque pandémique, de nouveaux dispositifs publics de gestion de crise. Malgré la bonne concertation des administrations et la mobilisation des acteurs concernés, son bilan se traduit par une disproportion majeure entre l’ampleur des moyens financiers et de l’organisation déployés à cet effet, et la faiblesse de la couverture vaccinale obtenue, qui n’aura touché qu’un peu plus de 5 millions de personnes, soit 8,5 % de la population. Le coût réel pour les finances publiques de la politique suivie atteint ainsi quelque 60 euros par vaccin utilisé et plus de 110 euros par personne vaccinée. Une stratégie de vaccination qui a manqué de souplesse La stratégie destinée à offrir à l’ensemble de la population la possibilité de se faire vacciner dans des centres créés à cet effet s’est révélée d’une excessive rigidité, au regard des rapides adaptations qu’aurait appelées un risque sanitaire plus modéré qu’il n’était prévu. Le constat du défaut de réactivité et de souplesse touche aussi la communication publique développée à l’appui de la campagne, les contrats d’acquisition de vaccins signés sans clauses conditionnelles comme le mode d’organisation trop exclusivement fondé sur des centres de vaccination ad hoc. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 26Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes réviser le plan national pandé- mie grippale pour l'adapter davantage aux besoins de la gestion de crise et à la gravité de la menace sur le territoire national ; introduire dans ce même plan un volet financier et budgétaire ;  mieux estimer la réalité du travail et des délais de réaction des services déconcentrés impliqués dans l’organisation locale de la gestion de crise ;  n’exclure a priori de l’organisation de la campagne de vaccination ni les hôpitaux, ni les médecins libéraux, compte tenu du rôle de conseil de proximité qu'ils doivent jouer en matière de santé publique ; repenser la communication gouvernementale sur la campagne de vaccination ;  en dehors même de toute crise sanitaire, engager une mobilisation en faveur de la politique de vaccination pour permettre une appréciation plus objective des avantages de celle-ci ; organiser une coordination européenne pour renforcer la position des Etats dans la négociation des contrats d'achats de vaccins. Recommandations 27 La campagne de lutte contre l’épidémie de grippe A(H1N1) : bilan et enseignements 8 Le système de santé en Polynésie française et son financement La Polynésie française (260 000 habitants) dispose d’un système de santé spécifique, dont elle assure elle-même l’organisation, le pilotage et la gestion, dans le cadre de son régime particulier d’autonomie politique et administrative. Un système globalement performant L’organisation sanitaire mise en place, accessible au plus grand nombre, couvre l’ensemble du territoire et associe la prévention aux soins. Pour les activités non assurées localement, les patients bénéficient d’évacuations sanitaires leur permettant de recevoir les soins appropriés en métropole ou en Nouvelle-Zélande. Les performances du système de santé présentent d’incontestables aspects positifs, surtout lorsqu’elles sont comparées à celles des pays qui partagent avec cette collectivité d’outre-mer les handicaps de l’insularité et de l’isolement. L’évolution et le niveau de l’espé- rance de vie ou du taux de mortalité placent la Polynésie française dans une position favorable. Les indicateurs de moyens, comme la densité médicale, sont équivalents, voire supérieurs à ceux des pays les plus développés du Pacifique Sud. Un pilotage défaillant L’instabilité politique que connaît la collectivité d’outre-mer depuis 2004 et le manque de permanence des cadres chargés de la conception des normes expliquent largement cette défaillance. La réglementation laisse subsister de nombreuses lacunes, notamment en matière de sécurité sanitaire. Il n’existe plus de véritable politique de la santé depuis 2005. Le schéma d’organisation sanitaire de la Polynésie française est ancien. L’ouverture du nouvel hôpital de référence en 2010 aurait offert l’occasion de le réviser en profondeur. Ce schéma n’a d’ailleurs jamais été considéré comme l’outil de régulation de l’offre de soins hospitalière et de répartition optimale des ressources qu’il aurait dû être. Enfin, l’information l’état sanitaire dont dispose la collectivité de la Polynésie française est incomplète et ancienne. Les résultats des enquêtes générales les plus récentes sur l’état de santé des polynésiens remontent à 1995. Le programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) est Synthèses insuffisamment développé et peu utilisé. du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 28Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 29 Le coût du système de santé de la Polynésie fran- çaise est élevé La dépense courante de santé, jamais évaluée depuis qu’a été instaurée la protection sociale généralisée en 1994, représentait en 2008 plus de 72 MdF CFP (604 M€), soit l’équivalent de 48,7 % du budget de la Polynésie fran- çaise et 13 % de son PIB. Son rythme de croissance, très supérieur à celui observé en métropole, est environ deux fois plus élevé que celui du PIB. Or, cette tendance semble difficile à infléchir tant en raison des caractéristiques de morbidité de la population, combinées à son vieillissement, que du fait des conséquences de la rénovation de l’appareil hospitalier. Dans ces conditions, les deux principaux financeurs de la santé, la CPS (caisse de prévoyance sociale) et la Polynésie française, qui doivent faire face à des difficultés budgétaires croissantes liées à une crise économique sans précédent, ne paraissent plus être en mesure d’assurer, en l’état, l’équilibre du système. Une réforme de grande ampleur s’impose pour garantir la pérennité du système Des mesures drastiques d’économie apparaissent indispensables. Une rationalisation des structures de soins, notamment hospitalières et une gestion plus efficace des moyens humains doivent être envisagées. Mais une refonte des principes et mécanismes de financement du système de santé doit également être entreprise. La collectivité d’outre-mer devrait ainsi être en mesure de fixer des objectifs et définir leurs indicateurs de réalisation, de mettre à disposition des données annuelles tirées des comptes de la santé. Ces moyens qu’elle opposera aux modalités habituelles d’allocation des ressources, devrait lui permettre de déterminer un objectif annuel de dépenses de santé, ou d’élaborer des conventions d’objectifs et de moyens, afin d’assurer un pilotage, à la fois transparent et chiffré, des politiques publiques dans ce secteur. définir et hiérarchiser les objectifs de santé ; optimiser l’offre de soins ; entreprendre la refonte des principes et mécanismes de financement de la santé ; affirmer la prééminence de la Polynésie française dans les processus de décision. Recommandations 29 Le système de santé en Polynésie française et son financement 9 Le soutien public aux entreprises exportatrices Comme ses principaux concurrents, dans le respect des règles de la concurrence posées par le droit communautaire, l’OCDE (Organisation de coopé- ration et de développement économiques) et l’Organisation mondiale du commerce (OMC), la France conserve des dispositifs nombreux destinés à favoriser l’accès de ses entreprises aux marchés extérieurs. Le soutien public a toutefois vocation à être subsidiaire par rapport au marché. Ce sont 6,9 % des exportations fran- çaises et de l’ordre de 10 à 15 % des entreprises exportatrices qui ont fait l’objet d’un soutien en 2009. Une réorganisation encore inachevée La grande variété des acteurs du commerce extérieur au sein de la sphère publique a conduit l’Etat à chercher à mieux les organiser. Il a créé une commission interministérielle d’appui aux contrats internationaux, chargée de coordonner les moyens destinés aux plus grands projets. Il a constitué un établissement public industriel et commercial, Ubifrance, qui dispose désormais d’un réseau de missions économiques présentes dans 44 pays. Cette rationalisation positive des leviers de soutien public est toutefois encore inachevée. La clarification des rôles entre Ubifrance, dont l’action s’est modernisée, d’une part, et les autres acteurs – Oséo, Coface, chambres de commerce en France et à l’étranger, opérateurs privés spécialisés dans le commerce international, régions - n’apparait pas encore suffisante. Dans le cadre de la renégociation, en 2011, de la convention d’objectifs et de moyens d’Ubifrance, il conviendrait que l’Etat définisse de manière plus précise la mission de service public de l’établissement, dans une logique de subsidiarité par rapport aux acteurs privés de l’export. Un ciblage du soutien contestable Les dispositifs sont faiblement orientés vers les zones géographiques où les entreprises accèdent le moins facilement aux marchés. Par ailleurs, les aides pourraient être attribuées de manière plus sélective vers les entreprises susceptibles d’exporter dans la durée. La politique de ciblage actuelle peut être coûteuse pour les finances publiques, car elle conduit à exposer l’Etat à un taux d’échec élevé qu’il prend en charge dans le cadre de sa garantie à la Coface. De manière générale, les risques budgétaires associés à la garantie de l’Etat doivent être mieux encadrés et pilotés. Le Parlement doit en être davantage informé. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 30 Cour des comptes 30Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Recommandations définir une politique « d’internationalisation des entreprises » tenant compte de ses consé- quences en termes d’emploi national ; améliorer le pilotage de cette politique par : - une définition précise de la mission de service public d’Ubifrance dans le cadre de la prochaine convention d’objectifs et de moyens signée par l’État ; - le suivi des conventions croisées signées entre les différents acteurs du commerce extérieur et une rationalisation de leur rôle respectif ; - la mise en place de dispositifs d’évaluation des instruments de soutien ; - l’amélioration du dispositif de veille sur les différents systèmes de financement et de soutien, y compris en dehors des pays de l’OCDE ; mieux cibler le soutien par : - une orientation plus sélective des aides vers les entreprises susceptibles d’exporter sur la durée ; - la limitation des effets d’aubaine à travers la suppression des aides à la prospection que sont le SIDEX et le crédit d’impôt ; - une meilleure maîtrise des risques budgétaires par une amélioration du suivi budgétaire des garanties publiques octroyées à la Coface grâce à une meilleure information du Parlement, une meilleure appréhension des risques, en particulier non souverains, et une utilisation effective de la comptabilité d’engagement. Le soutien public aux entreprises exportatrices 31 Les conséquences de la politique de soutien au développement international La politique de soutien aux exportations se réoriente de manière incertaine vers le soutien à l’internationalisation des entreprises, qui conduit à des offres françaises intégrant la production de filiales ou de fournisseurs à l’étranger, en Europe ou ailleurs. Le financement sur garanties publiques de tels contrats d’exportation, qui obéit à des conditions souples, peut conduire à accompagner des stratégies de délocalisation des entreprises. 10 La compensation des charges du service public de l’électricité La contribution aux charges de service public de l’électricité (CSPE) : un montant substantiel (1,7 Md€ en 2009) pourtant méconnu Cette contribution, que les consommateurs acquittent directement en réglant leurs factures d’électricité, sert à compenser des charges inhérentes au service public de l’électricité supportées par divers opérateurs du marché de l’électricité : essentiellement, le soutien aux énergies renouvelables et à la cogé- nération, la péréquation tarifaire dans les départements d’outre-mer et en Corse et les tarifs sociaux de l’électricité. Depuis sa création par l’article 38 de la loi du 3 janvier 2003, les charges que la CSPE est censée compenser ont augmenté rapidement et de façon incontrô- lée, tandis que le taux de la contribution est, lui, resté inchangé, à 4,5 €/MWh jusqu’à fin 2010, le ministre chargé de l’énergie s’abstenant de le modifier. Entre 2004 et 2009, le total des charges de service public est passé de 1,53 Md€ à 2,66 Md€ Au sein de ces charges : - les tarifs sociaux, bien qu’en forte croissance, n’occupent encore qu’une place marginale (3,2 % en 2008) ; - la péréquation tarifaire, dans les départements d’outre mer et en Corse est passée de 23 % en 2004 à plus de 45 % en 2009 ; - les achats d’énergie, qui résultent du soutien aux énergies renouvelables et à la cogénération, occupent une place prépondérante, de près des deux-tiers du montant des charges. En leur sein, les filières éolienne et photovoltaïque prennent une importance grandissante. Rapportée au volume total de l’électricité achetée, cette filière ne passerait que de 0,07 % en 2008 à 0,8 % en 2010, mais son poids relatif dans les charges compensées par la CSPE augmenterait dans le même Synthèses temps de 0,9 % à 10,3 %. du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 32Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes L’assiette de la CSPE a progressé moins vite que les charges Il en résulte un déséquilibre croissant du mécanisme de compensation, essentiellement supporté par EDF qui assume plus de 95 % des charges du service public de l’électricité. L’entreprise chiffre le déficit cumulé de recouvrement de CSPE à 2,6 Md€ fin 2010. Pour 2011, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) estime les charges prévisionnelles à 3,47 Md€. Elle évalue à 12,90 €/MWh, la contribution qui serait nécessaire pour les compenser. Des mesures correctrices viennent certes d’être prises. La loi de finances pour 2011 permet l’augmentation de 3 €/MWh de la CSPE, dont le montant total est ainsi porté à 7,5 €/MWh. Par ailleurs, le Gouvernement a, par un décret du 9 décembre 2010, suspendu pour trois mois le mécanisme d'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil. La Cour estime cependant que ces correctifs n’apportent pas de véritable remède à la dérive structurelle du système actuel maîtriser les facteurs de croissance des charges du service public de l’électricité, au premier rang desquelles figure le système de l’obligation d’achat, à des tarifs trop attractifs, fonctionnant « à guichet ouvert » ; s’interroger sur l’opportunité de continuer à soutenir des filières qui ne figurent pas parmi les priorités gouvernementales en matière de politique énergétique, comme la cogénération ; remettre à plat le dispositif d’ensemble afin d’en rendre le fonctionnement plus lisible et d’en clarifier le statut fiscal ; réexaminer le financement du soutien au développement des énergies renouvelables par le consommateur d’énergie. Recommandations La compensation des charges du service public de l’électricité 3311 Les pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES) : un second souffle nécessaire Une nouvelle dynamique depuis 2006 La loi de programme pour la recherche de 2006 a créé les pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES), qui devaient être le lieu privilé- gié de mutualisations structurantes entre établissements. Au 1 er janvier 2011, 21 PRES ont été créés. Une réelle dynamique a été lancée. Le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche a favorisé l’émergence de projets sous la forme de nouveaux établissements publics de coopération scientifique (EPCS). L’opération Campus, de nature immobilière et dotée d’un capital de 5 milliards d’euros, est venue conforter ce mouvement, les PRES étant le plus souvent porteurs des projets retenus. Des résultats modestes Toutefois, le développement des PRES a été contrarié, pour plusieurs raisons : la priorité donnée, dès 2007, à la mise en œuvre de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (loi LRU), qui a relégué au second plan les logiques coopératives ; un accompagnement ministériel insuffisant, une fois passée la vague de création ; une attitude en retrait des grands organismes de recherche ; enfin, l’empilement de dispositifs multiples de différentes natures au fil des années sans articulation entre eux. De fait, les résultats sont très en deçà des attentes suscitées. Les PRES ont encore un impact modeste sur la formation. Des politiques de site peinent à émerger pour la recherche. La gouvernance des PRES est souvent inadaptée à leurs ambitions. Une nécessaire clarification Les moyens financiers nouveaux, notamment, les « investissements d’avenir » lancés dans le cadre du grand emprunt, sont de nature à favoriser les démarches de regroupement ou leur consolidation, et à affermir le rôle des PRES. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 34Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Recommandations renforcer l’accompagnement de l’Etat par la contractualisation avec les PRES, l’objectif devant être à terme la signature d’un contrat unique de site et la définition d’une vision partagée des politiques de site entre l’Etat, les collectivités territoriales, les établissements d’enseignement supérieur et les organismes de recherche ; orienter le devenir des PRES dans deux directions par le soutien apporté, dans les cas où l’intégration est la formule la plus adaptée, à la création d’un nouvel établissement public dans lequel fusionneraient leurs membres ; ou quand la fusion ne semble pas pertinente, la constitution d’ensembles confédéraux pérennes à la forte identité et aux compétences et responsabilités renforcées. Les pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES) : un second souffle nécessaire 35 Cependant, le contexte budgétaire général difficile impose l’obligation d’œuvrer à l’utilisation efficiente des nouveaux moyens octroyés. Dans cette perspective, il y a urgence à préciser clairement ce qui est attendu des PRES. Si ces structures sont appelées à être des acteurs majeurs de la recomposition en cours, il convient alors d’en faire des lieux d’impulsion et de portage des politiques de site ainsi que de réels éléments fédérateurs, en matière de carte des formations, de politique de recherche et de valorisation. 12 L’Agence nationale de la recherche (ANR) : premiers constats et perspectives Créée en 2005, l’Agence nationale de la recherche (ANR), pour l’essentiel de son activité, lance des appels à projets auprès des équipes de recherche et sélectionne les projets retenus sur la base de critères d’excellence scientifique. Elle dispose pour ce faire depuis 2006 d’un budget d’intervention annuel d’environ 800 M€. La Cour a souhaité dresser un premier bilan de l’action de cette agence à un moment où trois décisions majeures ont été prises : en juin 2009, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche a annoncé le passage de 25 % à 50 % de la part des crédits consacrée à des appels à projets non-thématiques, et la prise en charge par l’ANR de la totalité des missions jusqu’alors assurées pour son compte par des « unités supports » abritées par différents établissements de recherche et d’enseignement supérieur. Enfin, l’ANR gèrera 18,9 Md€ des « investissements d’avenir », décidés dans le cadre du Grand Emprunt. Ces décisions sont appelées à changer la nature de l’agence, initialement conçue par le législateur comme une structure légère. Une montée en puissance réussie Créée en 2005, l’Agence nationale de la recherche a su très rapidement trouver sa place dans la politique publique de la recherche. Son action, tournée vers le financement de projets, consacre une évolution importante du paysage français de la recherche, convergente avec les pratiques de nos principaux partenaires étrangers. L’ANR a apporté dans ce cadre des processus de sélection formalisés, reposant sur l’évaluation par les pairs. Par delà les débats parfois vifs qui ont entouré sa création, la communauté des chercheurs s’est mobilisée pour répondre aux appels à projets de l’ANR : dès 2005, l’agence a reçu 5 500 projets au titre de la trentaine d’appels à projets lancés, elle en a sélectionné 1 462 et engagé près de 540 M€ de crédits. Au total, entre 2005 et 2009, l’agence aura été destinataire d’environ 25 000 projets de recherche et en aura financé 5 800 pour un montant total de plus de 3 Md€. Des modes d’intervention à consolider Les règles qui gouvernent l’attribution des aides de l’ANR sont héritées de dispositifs anciens, perfectibles et exercent des effets qu’il convient de corriger. Tout d’abord, les aides, en général délivrées pour trois ans, peuvent s’avérer trop courtes dans certains domaines comme les sciences humaines et sociales et les mathématiques, et le taux de sélecSynthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 36Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 37 tion des projets, assez rigoureux, peut aboutir à écarter les dossiers les plus innovants. Ensuite, l’ANR intervient de façon différenciée dans les laboratoires publics et les laboratoires privés, en raison en particulier du fait que les laboratoires publics disposent de financements issus du budget de l’Etat pour leur fonctionnement récurrent. Sans remettre en cause la justification de modes différents de calcul pour ces deux catégories de bénéficiaires, l’enquête de la Cour l’a amenée à constater sur la base d’un échantillon que les taux de concours qui en résultent sont très différents : de l’ordre d’environ 25 % du coût total d’un projet pour un laboratoire public contre près de 50 % pour un laboratoire privé en 2009. Enfin, la différence principale entre les aides aux laboratoires publics et privés tient au fait que les rémunérations des personnels permanents sont logiquement exclues de l’assiette des dépenses éligibles aux aides de l’ANR dans les structures publiques. L’agence intervient dès lors essentiellement en finançant des personnels occasionnels : elle finançait en 2008 plus de 15 000 contrats à durée déterminée. Cette situation suppose que l’ANR procède à un suivi régulier du devenir de ces personnels et invite à réfléchir à un élargissement de l’assiette des dépenses de personnels éligibles aux aides de l’ANR, qu’il s’agisse du financement de décharges partielles d’enseignements ou de primes pour les porteurs de projets. Des fragilités en matière financière et de gestion En matière financière, budgétaire et comptable, le contrôle de la Cour a mis en évidence des faiblesses qui devront être surmontées avant que l’ANR n’assure la gestion pour compte de tiers des 18,9 Md€ d’investissements d’avenir qu’il est prévu de lui confier. Ainsi, l’agence ne retraçait pas dans ses comptes ses engagements pluriannuels jusqu’en 2009 et a dû procéder à l’occasion du contrôle de la Cour à la comptabilisation d’une provision de plus de 1 Md€ à ce titre. Ses besoins en crédits de paiement budgétaires sont calculés sans tenir compte du calendrier effectif de versement des aides : il en résulte un excédent de 400 M€ de versement de la part du budget de l’Etat. Dans ce contexte, la décision d’arrê- ter en trois ans l’activité des unités supports représente un pari : jusqu’en 2009, ces unités abritées par une douzaine d’établissements d’enseignement supé- rieur et de recherche géraient 80 % des appels à projets de l’agence. Ce pari est d’autant plus risqué que cette décision n’est pas mise en application dans des conditions satisfaisantes et écarte l’ANR des orientations tracées par le législateur qui en faisait une structure légère. Un positionnement straté- gique à clarifier Plusieurs dispositifs prévus par la loi ne sont pas appliqués. Il en va en partiL’Agence nationale de la recherche : premiers constats et perspectivesL’Agence nationale de la recherche : premiers constats et perspectives culier du contrat pluriannuel avec l’Etat. La négociation et la conclusion d’un tel contrat apparaissent aujourd’hui nécessaires et urgentes. Ce contrat devra en particulier hiérarchiser les objectifs de l’agence et préciser les conditions dans lesquelles la programmation de l’agence s’articule avec les priorités stratégiques de l’Etat. Six ans après sa création, le positionnement des aides de l’agence et les résultats obtenus méritent de faire l’objet d’une évaluation, à partir de la mise au point d’indicateurs permettant d’appré- cier l’efficacité et l’efficience spécifiques de l’agence. Il est d’autant plus important de placer l’action de l’ANR dans un cadre pluriannuel que le projet de loi de finances pour 2011 prévoit de lui accorder des dotations en baisse, posant la question de la place finalement réservée aux financements sur projets dans la politique publique de la recherche. S’agissant de la stratégie : établir et signer rapidement le contrat pluriannuel prévu par la loi entre l’Etat et l’ANR qui devra en particulier clarifier les objectifs assignés à l’agence et l’articulation entre les priorités stratégiques de l’Etat et le choix des programmes donnant lieu à appel à projets ; construire des indicateurs d’impact de l’action de l’agence permettant de mesurer sa valeur ajoutée ; S’agissant de la gestion : maîtriser la croissance des effectifs de l’agence, en prévoyant un encadrement de gestion d’un niveau suffisant ; établir les dotations annuelles de l’ANR en crédits de paiement à partir d’un calendrier précis des besoins liés aux engagements ; S’agissant des aides délivrées par l’agence : mesurer les taux d’aide effectifs pour les laboratoires publics et privés de façon à justifier les écarts constatés ou à les résorber ; préciser les frontières entre certaines actions des investissements d’avenir et la programmation propre de l’ANR ; veiller à la mise en œuvre du dispositif spécifique de valorisation des résultats des recherches publiques aidées par l’ANR. Recommandations Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 38Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 39 13 Les flux migratoires irréguliers en Guyane, à Mayotte et à Saint-Martin L’importance des flux migratoires irréguliers est un phénomène majeur en Guyane, à Mayotte et à Saint-Martin Les frontières de ces territoires sont particulièrement difficiles à surveiller du fait de l’insularité ou, pour la Guyane, d’une forêt amazonienne immense et peu peuplée, ainsi que d’une attractivité d'autant plus grande que le niveau de vie des habitants des pays voisins, culturellement et linguistiquement proches, est considérablement inférieur. 31 000 reconduites à la frontière d’étrangers en situation irrégulière outremer en 2009 95 % de ces reconduites ont été effectuées à partir de Mayotte (près des deux tiers), de la Guyane (environ un tiers) et de Saint-Martin. Leur nombre n’a cessé de croître entre 2002 et 2009, pour devenir même supérieur à celui enregistré en métropole. Pour la première fois en 2009, le nombre de personnes retenues dans les centres de rétention administrative d’outre-mer a approché celui de la métropole alors qu’il en représentait moins du tiers en 2005. L’essentiel concerne Mayotte et la Guyane. La politique menée atteint ses limites Ces données traduisent des difficultés persistantes à maîtriser les entrées irrégulières sur le territoire plus que l’efficacité de la politique menée, qui est essentiellement fondée sur le renforcement des moyens des forces de sécurité. 1) Le régime juridique comporte des particularités que deux lois de 2006 et 2007, relatives à l’immigration et à l’inté- gration, ont renforcées. Les droits de recours des personnes retenues y sont plus limités qu’en métropole et les échecs à l’éloignement y sont bien moindres. Les dérogations au droit commun, motivées par les caractéristiques des territoires concernés, rendent plus difficile le contrôle par le juge de la régularité des procédures de reconduite. 2) L’organisation des moyens pour maîtriser les flux migratoires irréguliers est peu satisfaisante. En Guyane, les dispositifs de la police aux frontières connaissent des dysfonctionnements, du fait notamment de choix immobiliersLes flux migratoires irréguliers en Guyane, à Mayotte et à Saint-Martin malencontreux. A Mayotte, la réponse judiciaire, en particulier vis-à-vis des passeurs, se heurte à la faiblesse des effectifs de magistrats et à la surpopulation de la maison d’arrêt de Majicavo. A Saint-Martin, l’action de la police aux frontières souffre de la dispersion des locaux et d’un dispositif de contrôle inadapté. 3) S’agissant des centres de rétention administrative, des carences ont été relevées pour la situation des femmes et des enfants ainsi que pour l’assistance sanitaire et juridique. La professionnalisation de la gestion des centres reste insuffisante. Le centre de Cayenne a été mis aux normes en 2007 mais son extension nécessite de le détruire pour en construire un neuf. Le centre de Mayotte connaît une surpopulation récurrente depuis près de dix ans ; le projet de nouveau centre annoncé pour mi-2007 a été repoussé à juin 2012. 4) Des problèmes généraux sont mal résolus. Le nombre de « réitérants », c’est-à-dire des personnes qui reviennent en France après avoir été reconduites à la frontière, n’est pas mesuré et les services concernés n’ont pas d’objectif en la matière. La répartition des effectifs de la police aux frontières n’est pas rationnelle : la Guyane et Mayotte sont sous-dotés par rapport aux Antilles, alors que les problèmes y sont plus aigus. En matière de transports aériens, l’avion spécialement affrété depuis 2008 en Guyane sert essentiellement pour des vols intérieurs, alors qu’il n’est pleinement justifié que pour des reconduites directes vers l’étranger. 5) La conduite des relations avec les Etats voisins, assurée par plusieurs ministères, apparaît mal coordonnée. Les résultats des quelques initiatives prises ces dernières années ne sont pas à la hauteur des enjeux. En Guyane, les commissions mixtes sont très récentes avec le Surinam et le Guyana, Etats dont les pratiques sont un frein important aux reconduites. La coopération régionale reste limitée A Mayotte, les négociations engagées par la France pour normaliser ses relations avec l’Union des Comores n’ont pas abouti. Peu d’initiatives ont été prises pour établir une réelle coopération régionale. La départementalisation de Mayotte, dont l’Union des Comores n’a jamais admis d’être séparée, risque de ne pas faciliter un tel processus. A Saint-Martin, alors que le traité de Concordia de 1648 entre la France et les Pays-Bas (cette île, comme les autres départements d’outre-mer, n’est pas incluse dans les accords de Schengen), établit une libre circulation entre les deux parties de l’île, un contrôle commun dans les aéroports de l'île n’est toujours pas en place. Le projet d’accord de coopération policière, finalement élaboré, n’était toujours pas signé en octobre 2010. La négociation d’un accord de réadmission n’a jamais été sérieusement envisagée. 40 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes41 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes évaluer périodiquement les avantages et les inconvénients des dispositions juridiques dérogatoires applicables outre-mer ; adapter la carte des lieux de rétention ; accélérer la construction d’un nouveau centre de rétention administrative à Mayotte ; compléter l’assistance sociale, médicale et juridique ; professionnaliser davantage la gestion de la rétention et de la reconduite en outre-mer ; mesurer systématiquement la réitération et fixer en la matière des objectifs aux services concernés ; améliorer la prise en compte des flux migratoires irréguliers dans la conduite des relations avec les Etats voisins, notamment en clarifiant la répartition des compétences respectives entre les ministères concernés. Recommandations Les flux migratoires irréguliers en Guyane, à Mayotte et à Saint-Martin14 La gestion des risques naturels dans les départements d’outre-mer Les départements d’outre-mer sont très exposés aux risques naturels : séismes, tsunamis, cyclones, risque volcanique, submersion marine et inondations. L’ampleur et la diversité des risques naturels y ont développé une « culture du risque », tant dans la population que chez les élus. Mais sa traduction souffre, notamment au niveau des collectivités locales, de moyens humains et financiers limités. Quant aux actions relevant de l’Etat, elles restent perfectibles. Les dispositifs de prévention montrent plusieurs insuffisances Les plans de prévention des risques (PPR) ne sont pas tous approuvés. Certains d’entre eux sont imparfaits, en particulier aux Antilles : aléa « houle et marée cyclonique » mal pris en compte ; microszonages sismiques restant à inté- grer, ambiguïtés de certains zonages en Martinique. Les PPR approuvés ne sont pas toujours appliqués avec rigueur. Le contrôle des permis de construire est inégal. La lutte contre les constructions illégales est insuffisante. Le « plan séisme Antilles » existe mais présente plusieurs défauts. Son caractère interministériel est insuffisant. L’association des élus locaux n’a pas été prévue à l’origine. La diversité de ses objectifs, sans hiérarchisation, présente un risque de dispersion. Les financements budgétaires, d’origine variée, rarement identifiables, ne font pas l’objet d’une programmation financière pluriannuelle. Le bilan des dépenses de renforcement et d’adaptation du bâti est médiocre. L’effort de formation n’est pas suffisant pour toucher, dans des délais raisonnables, l’ensemble des acteurs concernés. Les méthodes de sensibilisation devraient être modernisées. De nombreux bâtiments de l’Etat, essentiels en cas de crise, non conformes aux normes Pour les établissements d’enseignement, si les diagnostics viennent d’être pour l’essentiel achevés, les travaux ne font que s’engager. Une partie du parc de logements sociaux est vulnérable tandis que, pour les logements privés, les particuliers n’ont pas les moyens de faire établir le diagnostic de la vulnérabilité de leur habitation ; le diagnostic sismique n’est pas obligatoire lors d’une transaction. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 42Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 43 La prise en compte des risques naturels est encore imparfaite La politique d’aménagement du territoire prend encore mal en compte le risque volcanique. Si la sensibilisation de la population au début de chaque « campagne cyclonique » apparaît satisfaisante, l’information sur les dispositions constructives pour résister à des vents importants est moins systématique. Pour les inondations, la réforme de l’annonce des crues, initiée en 2003 en métropole, n’est pas encore appliquée dans les DOM ; l’élaboration de plans d’action de prévention des inondations est en retard. La prise en compte du risque de submersion marine est souvent insuffisante. Les actions restant à mener pour prévenir le risque de mouvements de terrain sont de grande ampleur. Les lacunes de la gestion de crise Pour les risques volcanologique et sismologique, le bâtiment de l’observatoire en Martinique n’est pas aux normes parasismiques. Les observatoires ne sont pas équipés pour les séismes de forte magnitude ; le dispositif de financement des observatoires est incertain, même pour garantir la maintenance des équipements. Les systèmes d’alerte au tsunami dans l’océan Indien, et surtout dans les Caraïbes, ne sont pas pleinement satisfaisants en raison de l’insuffisance des équipements. La réduction des moyens des forces armées sur place nécessite de prévoir des moyens humains supplémentaires d’intervention, à titre permanent ou temporaire. Plusieurs plans de secours méritent d’être actualisés. Les retours d'expérience sont en général réalisés mais les conséquences pratiques à en tirer ne sont pas établies précisément, et l’identification et la mesure des coûts insuffisantes. Le dispositif d’indemnisation Alors que l’application du régime « catastrophes naturelles » a une portée limitée en raison de la faible proportion de personnes assurées, la mise en jeu du fonds de secours, financé par le budget de l’Etat, appelle plusieurs observations. Les exploitations agricoles en sont les principales bénéficiaires car elles ne sont pas éligibles au fonds des calamités agricoles. L’application des règles, comme leur contrôle, manquent de rigueur. Il s’écoule parfois plusieurs années entre la catastrophe et le versement complet des aides aux collectivités territoriales. Les importantes dépenses d’indemnisation (85 M€ de 2007 à 2009) doivent d’ailleurs être mises en regard de celles, somme toute assez réduites, consacrées à la prévention. 43 La gestion des risques naturels dans les départements d’outre-merRecommandations compléter et améliorer les plans de prévention des risques naturels, en particulier en matière sismique ; renforcer la lutte contre les constructions illégales ; pour le plan séisme Antilles, mieux associer les collectivités territoriales et contractualiser avec elles ; établir une programmation pluriannelle ; améliorer le caractère interministériel du dispositif ; accroître fortement l’effort de formation professionnelle ; mettre en place un dispositif de contrôle des règles de construction ; rendre obligatoire un diagnostic de vulnérabilité sismique lors d’une transaction immobilière ; stabiliser le cadre du financement des observatoires volcanologiques et sismologiques ; clarifier les responsabilités respectives du préfet et de Météo France ; inclure les DOM, et en priorité ceux des Antilles, dans la rénovation du réseau national d’alerte ; compléter les plans de secours ; exiger des collectivités locales l’établissement d’un plan communal de sauvegarde (PCS) ; prévoir des exercices « volcan » aux Antilles ; améliorer les retours d'expérience ; adapter le dispositif d’indemnisation pour mieux inciter à la prévention ; examiner la possibilité de rendre les exploitations agricoles des DOM éligibles au régime des calamités agricoles ; appliquer avec rigueur des règles uniformes pour le fonds de secours. La gestion des risques naturels dans les départements d’outre-mer Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 44Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 45 Cour des comptes 15 La politique de soutien à l’agriculture dans les départements d’outre-mer Le poids relatif de l’agriculture est, dans les quatre départements d’outremer (Guadeloupe, Guyane, Martinique et la Réunion), plus important qu’en métropole. Si la part de la population travaillant dans l’agriculture y est cependant du même ordre qu’en métropole (3,5 %), la forte croissance démographique fait de la production agricole un enjeu économique local essentiel. La politique de soutien public au secteur agricole mobilise des aides financières substantielles Les aides agricoles européennes relèvent d’un programme européen spé- cifique dont le volet concernant les régions ultrapériphériques, intitulé POSEI (programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité), s’applique aux quatre départements. Dans le cadre du POSEI-France, mis en œuvre en 2006, puis en 2007 pour la filière banane, un double choix a été affiché : maintenir les cultures exportatrices « structurantes » (banane et canne-sucrerhum) et favoriser la diversification des productions, pour améliorer l’autoapprovisionnement. Le montant des aides versées en a été augmenté, avec pour objectif de maintenir les emplois dans le secteur agricole. En dehors de ce programme et des aides européennes au développement rural, les aides nationales ont aussi fortement progressé, notamment après les événements sociaux de 2009 et la tenue des « Etatsgénéraux de l’outre-mer ». Au total, le montant des aides agricoles versées à l’outre-mer a crû de 40 % entre 2008 et 2010, passant de 370 M€ à 520 M€ (montant prévisionnel) ; il profite aux secteurs de la banane et de la canne à sucre. A l’occasion du contrôle de l’Office de développement de l’économie agricole d’outre-mer (ODEADOM), qui verse une partie de ces aides, la Cour a constaté que cet organisme, chargé par le code rural d’effectuer un bilan des aides agricoles versées à l’outre-mer, ne remplissait pas le rôle qui lui était imparti. La Cour s’est donc attachée à effectuer ce bilan et à apprécier la contribution des aides à un développement agricole durable. La politique de soutien à l’agriculture dans les départements d’outre-mer Les aides publiques représentaient, en 2008, 28,6 % de la valeur de la production agricole outremer, soit le double de la proportion constatée en métropole Cette moyenne recouvre des écarts importants, conséquence de la concentration des aides sur le secteur de la banane : 64,7 % pour la Martinique, 32,8 % pour la Guadeloupe, 14,5 % pour la Réunion et 8,4 % pour la Guyane. L’effort budgétaire de l’Etat pour les producteurs de bananes des Antilles prend aussi d’autres formes : ainsi, l’Etat a procédé à des abandons de créances sur des remboursements de prêts, pour 49,2 M€ ; des remboursements d’aides européennes ont aussi été demandés à l’Etat par l’Union européenne (88,4 M€). Le maintien des aides au secteur de la banane, alors que la production était en baisse, aboutit à une aide à la tonne entre 2007 et 2009 double de celle constatée entre 2002 et 2006. L’aide actuelle à l’hectare de bananeraies aux Antilles dépasse 15 000 €, soit plus de 300 000 € pour une exploitation de 20 hectares. Ce soutien ne s’est même pas concrétisé par un maintien des emplois, ces derniers ayant diminué de plus de 40 % dans les exploitations bananières des Antilles. La priorité accordée aux cultures exportatrices, pourtant peu compétitives sur le marché mondial, ne laisse qu’une faible part des aides aux autres productions locales. De ce fait, malgré l’accroissement du montant global des aides, l’approvisionnement de la population en produits locaux a généralement régressé et la balance commerciale des produits agricoles et alimentaires s’est dégradée. Ainsi, le taux de couverture de la balance commerciale de ces produits est de l’ordre de 20 %. La situation est pire encore pour l’agriculture biologique. Les problèmes posés par les pollutions liées aux traitements des bananiers La Cour a analysé les conséquences de la pollution par le chlordécone (insecticide utilisé encore en 1993), tant d’un point de vue budgétaire que sur les autres productions. Elle souhaite notamment que le versement des aides soit lié au respect de la réglementation environnementale, auquel le plan « banane durable » doit contribuer. L’ensemble des constatations faites conduit à s’interroger sur l’adéquation du modèle de développement agricole retenu pour ces départements. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 4647 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes redéployer les aides en privilé- giant la diversification des produits et les circuits de transformation, avec un objectif de réduction des importations ; prendre en compte le « bilan carbone » dans les raisonnements économiques, en vue de favoriser un développement plus endogène des productions ; lier le versement des aides au strict respect de la réglementation environnementale, et, d’une manière géné- rale, à des objectifs de développement durable mieux ciblés ; opérer un suivi du « plan chlordécone », en liaison avec le ministère chargé de la santé, pour ce qui concerne en particulier l’impact sur l’agriculture et l’aquaculture ; améliorer l’intégration des filières entre producteurs et transformateurs, en vue de répondre à la consommation locale, et développer la publicité en faveur de ces filières ; utiliser les instruments de maî- trise foncière, notamment ceux prévus par la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche ; astreindre l’ODEADOM à établir le bilan des aides agricoles outremer, prévu par le code rural ; favoriser l’élargissement des bénéficiaires du régime spécifique d'approvisionnement, en particulier dans le secteur de l’alimentation animale ; confier à l’ODEADOM le versement de l’ensemble des aides du POSEI et des aides nationales liées, tout en renforçant sa maîtrise de l’instruction et de la liquidation, pour chacun des dispositifs concernés. Recommandations La politique de soutien à l’agriculture dans les départements d’outre-mer16 Un premier bilan des externalisations au ministère de la défense L’externalisation vise à confier à des sociétés spécialisées, des tâches exécutées jusque là en interne, afin de permettre le recentrage des activités sur les missions dites de « cœur de métier » et obtenir un service de qualité identique ou supérieure à un coût inférieur. Les externalisations, une pratique plus fréquente Le ministère de la défense, qui doit pouvoir faire face aux situations de crises externes, avait pour tradition de produire en interne - « en régie » - la plupart des services dont il avait besoin. La suspension de la conscription a conduit à un premier train d’externalisations (pour les tâches ancillaires notamment). Ce mouvement s’est accéléré avec les réflexions liées à la stratégie de réforme ministérielle (2003), puis à la revue géné- rale des politiques publiques (RGPP) en 2006. Cette politique revêt une dimension particulière au ministère de la défense car elle est conduite simultanément à l’ensemble des réformes qui y sont par ailleurs engagées : interarmisation des forces, refonte de l’implantation territoriale des unités, création des bases de défense, adaptation au nouveau format opérationnel arrêté à la suite des travaux du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale publié en 2008. Plusieurs secteurs du ministère pouvant faire l’objet d’externalisations importantes, susceptibles de concerner de nombreux emplois, ont été identifiés. Un premier bilan des externalisations La Cour a examiné plus d’une dizaine de cas, leurs modalités, leurs coûts et leurs bénéfices. Les externalisations réalisées n’ont pas réduit la capacité opérationnelle des armées mais, la réalité des gains économiques qu’elles procurent apparaît difficile à apprécier. D’importants progrès restent à accomplir par le ministère pour utiliser à bon escient et efficacement les externalisations, en particulier en matière d’analyse des coûts et de délimitation des activités « cœur de métier ». Cinq conclusions peuvent être tirées : 1. Les externalisations du ministère de la défense ont une importance budgétaire encore limitée : environ 1,7 Md€ en 2008, soit un peu plus de 4 % des Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 48Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 49 crédits budgétaires du ministère (hors pensions). Le développement des externalisations depuis le début de la décennie est réel ; toutefois, le quasi-doublement du volume des dépenses recensées entre 2005 et 2008 correspond pour l’essentiel à des modifications de périmètre. Le niveau d’externalisation du ministère est légèrement inférieur à celui qui est observé au ministère de la défense allemand (5 % du budget), et très en deçà de ce qui est observé au Royaume Uni (25 %). 2. Les externalisations engagées ne mettent pas en cause la capacité opérationnelle des armées. Elles sont même parfois indispensables à la réalisation des missions, notamment en matière de transport stratégique (92 % du tonnage transporté l’est dans le cadre de contrats externalisés). Les armées doivent préciser ce qu’est le « cœur de métier » pour déterminer clairement le périmètre des activités « externalisables » sans risquer d’être un jour confrontées à des difficultés opérationnelles. 3. Les externalisations réalisées n’ont pas eu d’effet significatif sur les personnels. Les projets identifiés dans le cadre de la RGPP pourraient, en revanche, concerner près de 16 000 postes. Pour faciliter leur mise en œuvre, le ministère a fait inscrire à l’article 43 de la loi du 3 août 2009 des dispositions pour faciliter le transfert de personnels publics vers des entreprises prestataires. 4. La participation des PME au processus, objectif affiché par le ministère, n’est pas aujourd’hui mesurée. En outre, cette participation apparaît délicate à concilier avec les objectifs de rationalisation économique, plus favorables aux grands groupes. 5. La réalité des gains économiques est difficile à apprécier. L’absence de comptabilité analytique ne permet pas d’évaluer le coût de la production en régie et interdit donc la comparaison avec le coût de l’externalisation. Des progrès ont été réalisés mais trop d’études ne distinguent pas encore les gains liés à la rationalisation du service, de ceux nés de l’externalisation proprement dite. Cette distinction est pourtant indispensable, particulièrement lorsque l’externalisation fait encourir le risque d’une perte durable de compétence. Les externalisations peuvent permettre des gains Sous les réserves présentées, les externalisations peuvent faciliter des réorganisations qui seraient sinon difficiles à réaliser autrement (véhicules civils du ministère), ou délicates lorsqu’elles touchent des activités mobilisant un personnel important (gardiennage), du fait d’un différentiel significatif de rémunération avec le secteur privé. En revanche, les exemples analysés incitent à la prudence lorsqu’il s’agit principalement d’équipements : ainsi, de Un premier bilan des externalisations au ministère de la défensefaibles gains sont attendus à Dax (partenariat public privé de fourniture d’hélicoptères pour la base école), tandis que des surcoûts apparaissent dans la location avec option d’achat des A340 de l’armée de l’air. Or, dans le contexte budgétaire actuel, la tentation peut être forte de recourir aux externalisations pour réaliser des investissements lourds et immédiats pour lesquels les financements budgétaires ne sont pas disponibles, au prix du versement de flux durables de loyers. La multiplication d’opérations d’externalisation et de contrats de partenariat pour des opérations lourdes contribuerait alors à réduire les marges de manœuvre budgétaires, en rigidifiant durablement les dépenses de fonctionnement (titre 3 du budget). Par ailleurs, certaines des opérations n’offrent un avantage économique que grâce à des recettes tierces dont la réalisation est incertaine. Aussi, quelle que soit leur nature, pour être pleinement justifiées, les externalisations doivent-elles être justifiées par leurs mérites propres. clarifier la notion de « cœur de métier », ainsi que celle de « socle », lorsqu’il y est fait référence pour justifier le recours à des externalisations de complément ; développer une comptabilité analytique solide, préalable indispensable à l’engagement d’un processus d’externalisation, pour pouvoir juger chaque projet sur ses mérites propres ; renforcer les capacités d’analyse et de pilotage du ministère. Recommandations Un premier bilan des externalisations au ministère de la défense Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 50Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 51 17 La gestion du domaine skiable en Rhône-Alpes De grandes stations comme Vald’Isère, Tignes, Avoriaz, Val-Thorens, Les Ménuires, Courchevel, Méribel, Les Arcs, La Plagne, Chamonix, des stations de moyenne montagne comme Les Gets, Les Sept Laux et de petites stations, La Chapelle d’Abondance, Montricher-Albanne/Les Karellis, Villard de Lans constituent l’échantillon de cette enquête. Ces stations représentent 80 % du chiffre d’affaires des stations alpines, et 80 % de l'activité hivernale française. De multiples acteurs Plusieurs structures interviennent dans la gestion du domaine skiable : communes, exploitants des remontées mécaniques en régie directe ou déléguée, offices du tourisme, infrastructures de loisirs, détente et bien-être, sociétés d'économie mixte (SEM) d'animation. S'agissant de la seule gestion des remontées mécaniques, la tendance dominante a cependant été de la déléguer à des sociétés privées, qu'il s'agisse de sociétés d'économie mixte ou le plus souvent d'entreprises privées. De fait, les domaines skiables échappent souvent au contrôle des collectivités qui doivent assumer des missions de grande ampleur et intégrer plusieurs logiques, industrielle, commerciale, et territoriale. Une renégociation à fort enjeu L’arrivée à échéance des contrats trentenaires, conclus en application de la loi montagne du 9 janvier 1985, constitue dès lors pour les collectivités délégataires un enjeu vital. La question de leur renouvellement ou d’une gestion en direct se posera. Les collectivités auraient intérêt à se regrouper face aux opérateurs privés unis pour constituer des ensembles plus importants. Les collectivités, majoritairement isolées, se trouvent souvent affaiblies dans leurs relations avec les délégataires. Ainsi, certaines d’entre elles ne peuvent-elles obtenir les informations qui leur permettraient d’appréhender les incidences tarifaires des choix opérés, notamment lors d'innovations commerciales. Des risques multiples Un risque financier pèse sur les collectivités locales, dans un contexte de difficultés budgétaires : en supplément des conventions existantes, les collectivités sont parfois amenées à prendre en charge des investissements de grande ampleur, mais également des équipements liés à l’animation, sans pour autant que les délégataires, qui bénéficient de leurs retombées en termes deLa gestion du domaine skiable en Rhône-Alpes fréquentation de la station, contribuent à leur financement. Parallèlement, les stations doivent faire face à une évolution des pratiques à la fois estivales et hivernales et répondre à une demande orientée davantage vers la détente et les loisirs, induisant des dépenses nouvelles venant s’ajouter aux charges spécifiques de personnel et de matériel liées à l’activité traditionnelle. Des risques environnementaux doivent également être pris en considération, notamment pour les nouveaux équipements, dont l'intégration dans le paysage devient une exigence. Se pose également la question de l’utilisation de la neige de culture. Enfin, les collectivités doivent gérer un risque social, étroitement lié à leur capacité à proposer aux habitants des emplois locaux, pour la plupart dans le domaine du tourisme. Une gestion délé- guée de leur domaine skiable limite alors d’autant leurs possibilités d'influer sur l’emploi local. investir pour rester compétitif, mesurer le risque financier des engagements et procéder à une analyse comparative pour choisir au mieux le mode de gestion (directe ou déléguée) des équipements en fonction de la capacité financière ; se fédérer par des regroupements avec les collectivités gestionnaires de domaines skiables voisins, pour atteindre un équilibre face à leurs prestataires potentiels, eux-mêmes déjà fortement regroupés ; mettre en œuvre une programmation pluriannuelle des investissements ;  prévoir, dans les contrats avec les délégataires, une clause incitative garantissant aux délégataires un intérêt à poursuivre la modernisation des équipements, même dans les dernières années du contrat ;  établir des inventaires précis et contradictoires des biens affectés à l’exploitation, en distinguant les biens faisant retour gratuitement à la collectivité en fin de contrat et ceux susceptibles de faire l’objet d’une reprise par cette dernière ; tout en visant la satisfaction des besoins des usagers et la fidélisation de la clientèle, soucieuse d’authenticité autant que de détente, faire preuve de prudence avant de s’engager dans de coûteuses diversifications des activités, tant hivernales qu'estivales ; intégrer pleinement les préoccupations environnementales, et, de manière générale, du développement durable, dans l’élaboration des projets et la prise de décision. Recommandations Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 5253 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 18 La continuité territoriale avec la Corse Depuis 1976, le dispositif de continuité territoriale avec la Corse permet de réduire les contraintes de l’insularité. Les acteurs du dispositif A compter de 1991, la collectivité territoriale de Corse (CTC) s’est substituée à l’Etat pour définir les obligations de service public (OSP) sur des lignes de desserte qu’elle choisit. Elle conclut, via son office des transports de la Corse (OTC), des conventions avec chacune des compagnies qui assurent le service public de transport aérien ou maritime. Une dotation dite de continuité territoriale (DCT) d’un montant actuel de 187 M€ est allouée chaque année par l’Etat à la CTC qui la rétrocède à l’OTC. Celui-ci la répartit ensuite entre chaque mode de transport afin de financer les obligations faites aux transporteurs d’assurer un service régulier de qualité tout en appliquant des tarifs réduits pour certaines catégories de passagers, parmi lesquels les résidents corses. Deux dispositifs peuvent alors exister : la délégation de service public ou l’aide sociale. L’économie globale du dispositif de continuité territoriale s’est considérablement transformée entre 2001 et 2009 Le nombre total de passagers entrés et sortis de Corse sur les lignes aériennes ou maritimes sous OSP a augmenté de 30 %, passant de 4 à 5,2 millions. Cet accroissement s’est essentiellement concentré sur les lignes maritimes entre la Corse et Toulon gérées sous le régime de « l’aide sociale », lequel conduit l’OTC à rembourser une somme forfaitaire par passager bénéficiaire d’un tarif réduit. Les dépenses faites au profit des compagnies contractantes ont fortement évolué Elles ont dépassé le montant de la DCT versée par l’Etat. Les réserves financières de l’OTC, qui s’élevaient à plus de 40 M€ en 2001, sont à présent épuisées. Plusieurs raisons expliquent ces problèmes de financement aggravés par le gel de la DCT, qui n’évolue plus depuis 2009 :La continuité territoriale avec la Corse - l’augmentation importante de la compensation au passager aérien en 2003, qui a permis de restaurer l’équilibre financier de la CCM, société d’économie mixte de la CTC ; -l’accroissement de « l’aide sociale » versée au passager maritime, directement lié à celui du nombre de passagers transportés sous ce régime ; -l’augmentation de la compensation attribuée aux compagnies maritimes délégataires maintenues sur les lignes desservant Marseille, en dépit d’une perte relative importante du nombre de passagers transportés sur les lignes délé- guées ; -la réduction des tarifs sociaux dont l’impact n’a pas été mesuré au regard de l’économie globale du dispositif. Les défaillances du pilotage La CTC, autorité organisatrice, n’a ni su adapter les modes de conventionnement et le contenu des obligations de service public aux évolutions du trafic, ni su en anticiper les consé- quences financières. Les comptes rendus des transporteurs, souvent trop succincts, n’ont pas été correctement exploités et le nombre de passagers bénéficiant de conditions tarifaires n’est pas précisément connu. Les cahiers des charges des contrats successifs conclus pendant cette période et les négociations qui ont précédé leurs signatures n’ont pas suffisamment pris en compte les évolutions qui étaient pourtant perceptibles depuis plusieurs années. La gestion des contrats de délégation, notamment lors de leur préparation et de leur passation, n’a pas non plus permis le jeu optimal des règles de la concurrence. En définitive, faute de volonté et démunie d’instruments d’évaluation, la CTC n’a pas préparé les décisions straté- giques nécessaires pour faire évoluer un dispositif qui donnait depuis plusieurs années des signes d’essoufflement. définir clairement le rôle de l’Office des transports dans la conception et la gestion de la continuité territoriale, aussi bien maritime qu’aé- rienne, et mettre en place une véritable tutelle sur l’établissement ; renforcer les contrôles de la mise en œuvre et de l’exécution des OSP par les compagnies ; mettre en place les outils d’évaluation nécessaires à un débat global et objectif sur ce sujet ; favoriser les conditions de concurrence en anticipant davantage le lancement des procédures d’attribution des délégations de service public. Recommandations Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 5455 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 19 Les ouvriers d’Etat du ministère chargé de l’équipement et de l’aviation civile Sur 8000 ouvriers d’Etat du ministère, 2200 ont été recrutés sans base légale En 2009, sur 46 300 ouvriers d’Etat en activité dans les administrations d’Etat, le ministère chargé de l’équipement et de l’aviation civile en employait 8 000 répartis entre les ouvriers des parcs et ateliers (7 200) et les ouvriers de l’aviation civile (800). Près de 5 000 ouvriers sont effectivement affectés dans les parcs et ateliers de l’équipement, notamment pour l’exploitation et l’entretien des routes et pour les travaux de maintenance des véhicules et engins. A la suite des lois de décentralisation de 2004, ces personnels sont, depuis 2010, transférés aux collectivités territoriales, dans des conditions qui traduisent une certaine impréparation. Les 2 200 autres ouvriers affectés théoriquement dans les parcs et ateliers sont en réalité employés dans d’autres services selon des modalités irrégulières. Les quelque 800 ouvriers relevant de la direction générale de l’aviation civile sont, quant à eux, répartis entre 42 familles professionnelles au sein desquelles ils exercent des fonctions très variées (logisticien, chauffeur, peintre, informaticien, magasinier, climaticien, photographe, etc.) qui, dans le reste de la fonction publique, sont pour la plupart exercées par des fonctionnaires titulaires ou des contractuels. Ces ouvriers d'État bénéficient d’un « quasi-statut » très avantageux Les avantages de ces non-titulaires de la fonction publique sont multiples, en termes de recrutement, de promotion et de rémunération. De plus, ces ouvriers sont affiliés à un régime spécial de retraite qui leur assure une pension supérieure de 30 % en moyenne à celle versée aux agents titulaires de la fonction publique exerçant des fonctions comparables. La gestion de ces ouvriers d’Etat présente de nombreuses et graves irrégularités Depuis plusieurs années, les promotions sont accordées de manière abusive, sans maîtrise des coûts et au mépris des règles d’équilibre du pyramidage entre les différents niveaux hiérarchiques. DeLes ouvriers d’Etat du ministère chargé de l’équipement et de l’aviation civile plus, pour les ouvriers des parcs et ateliers, des promotions de compagnon à maître-compagnon sont accordées l’année précédant la retraite, alors qu’une telle pratique est expressément interdite par les textes. La quasi-totalité des élé- ments de rémunération des ouvriers de l’aviation civile doit être revue sans délai En effet, des heures supplémentaires fictives sont dissimulées dans le traitement principal des ouvriers de l’aviation civile, valorisant irrégulièrement l’ensemble de leur paie (jusqu’à 400 euros par an). Ce système occulte a représenté un coût de 3,6 M€ pour l’Etat depuis sa mise en place en 2002. Dans les services de l’aviation civile, encadrer deux ouvriers permet d’être nommé chef d’équipe et de voir ainsi son salaire majoré de 20 %, sans base réglementaire à cette majoration. La Cour a également recensé plusieurs compléments de rémunération irréguliers octroyés à ces personnels, de même qu’un taux de l’heure supplémentaire indûment survalorisé de 35 %, avant toute majoration légale. Les services de l’aviation civile n’ont pas été capables de communiquer le coût moyen salarial par niveau de ses ouvriers. Ces pratiques sont à l’origine d’une dérive financière importante Entre 2006 et 2009, la masse salariale des ouvriers des parcs et ateliers est restée stable pour des effectifs en diminution de 11 %, et celle des ouvriers de l’aviation civile a progressé de 29 % pour des effectifs en diminution de 4 %. La gestion des ressources humaines de ces personnels est gravement défaillante et les avantages sont consentis en l’absence de toute évaluation des personnels et sans recherche de productivité. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 5657 Synthèse du Rapport public annuel de la Cour des comptes Les ouvriers d’Etat du ministère chargé de l’équipement et de l’aviation civile Recommandations mettre un terme à tout recrutement d’ouvrier d’État dans les services du ministère chargé de l'équipement et de l'aviation civile ; identifier, au sein de la DRH de ce ministère, un seul service chargé de l’ensemble de la gestion des ouvriers d’État, quelle que soit leur affectation ; revoir l’ensemble du dispositif de primes, d’indemnités et d’heures supplémentaires applicables à cette catégorie de personnel, d’une part en supprimant celles qui apparaissent exorbitantes du droit commun de la fonction publique, d’autre part en donnant à celles qui subsisteraient un fondement juridique régulier ; cesser la pratique des « promotions coups de chapeau » et redéfinir le pyramidage des différentes catégories d’ouvriers d’État, par l’application de quotas de promotion négociés avec la direction du budget ; régulariser la situation des quelque 30 % des effectifs d’ouvriers qui ne sont pas affectés au sein des parcs et ateliers ; réformer le système d’information, de gestion et de paie de la DGAC, pour faire cesser toute pratique irrégulière et afin que cette direction soit capable, dans les meilleurs délais, de produire des données fiables en matière de gestion de son personnel ouvrier ; réorganiser la gestion des ressources humaines de la direction géné- rale de l’aviation civile afin de la fiabiliser et de mettre un terme à la pratique du paiement caché d’heures supplé- mentaires fictives.Cour des comptes 20 Le “quart de place” des militaires Les déplacements par chemin de fer des militaires sont à l’origine de la contribution de l’Etat à la SNCF la plus élevée (192,4 M€ en 2009) et dont l’évolution a été la plus dynamique depuis une dizaine d’années (+34,5 %). Le « quart de place » : une survivance historique des premières concessions de lignes ferroviaires Depuis le XIXème siècle, une réduction tarifaire de 75 %, dite « quart de place », est accordée aux militaires pour leurs déplacements en train d’ordre professionnel ou privé. Ce tarif est compensé par le budget de l’Etat depuis 1949, selon des modalités actuellement fixées par un accord-cadre et une convention signés en 2006 et 2007 entre l’Etat et la SNCF. Les militaires perçoivent le bénéfice de cette réduction tarifaire et du financement public de leurs voyages à titre privé comme un accessoire de leur statut : ils y voient une compensation des contraintes spécifiques liées à la vie militaire, qui impose une forte mobilité professionnelle et, souvent, un éloignement du foyer familial. L’évolution incontrôlée des dépenses Alors que les dépenses consenties à ce titre augmentaient rapidement, le ministère de la défense ne s’est pas doté des moyens d’en contrôler l’évolution ni de prévenir efficacement la fraude, probablement sous-évaluée. Les cartes de circulation sont encore éditées sur support papier ; les cartes vierges stockées dans les unités sont une source potentielle de diffusion de cartes contrefaites ; certains militaires ne restituent pas leur carte lorsqu’ils quittent l’armée. En outre, l’information sur les diffé- rentes variables liées aux cartes de circulation et à la compensation de cette charge par l’Etat – nombre de cartes, effectifs physiques, montant de la dépense – est cloisonnée, et le contrôle interne encore insuffisant. La mise en place des instruments de suivi des données relatives à l’émission des cartes de circulation est si récente que leur recensement n’est fiable que depuis 2009. Aucune comparaison systématique de l’effectif des militaires en activité avec le nombre des cartes de circulation en cours de validité n’est possible. Le ministère de la défense ne connaît pas le nombre exact des militaires ayant vocation à détenir une carte de circulation ; il ne peut donc le comparer à celui des cartes en cours de validité. Par ailleurs, Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 5859 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes les clauses de la convention qui habilitent l’Etat à opérer des contrôles sur la production des données informatiques de la SNCF entrant dans le calcul de la charge compensée sont restées lettre morte. De trop nombreux bénéficiaires Le champ des bénéficiaires du « quart de place » est vaste, puisqu’il comprend tous les militaires en position d’activité, telle que la définit leur statut. Cette situation concerne non seulement les militaires en fonction au ministère de la défense et dans la gendarmerie nationale, mais aussi ceux affectés auprès d’autres administrations de l’Etat ou d’établissements publics, voire dans des entreprises privées. Elle concerne également les généraux dits « de la 2ème section » qui, ayant fait valoir leurs droits à la retraite, demeurent à la disposition du ministre de la défense et, à ce titre per- çoivent une solde d’activité et bénéficient à vie d’une carte de circulation. La pertinence d’une telle extension de ce champ peut être mise en doute : le ministère de la défense finance les déplacements professionnels et personnels de militaires affectés hors de ses services, occasionnant avec divers opé- rateurs publics ou privés un transfert de charge qu’il est impossible de chiffrer. En principe destiné à compenser les sujétions spécifiques imposées aux militaires, le « quart de place » profite en réalité aussi à des personnes qui ne les subissent pas. La nécessaire réforme du « quart de place » Le ministère de la défense, désormais conscient de la nécessité de réformer le dispositif, envisage de moderniser le support de la carte de circulation (carte à puce). L’invalidation à distance des cartes des agents ayant rompu tout lien avec le service serait ainsi rendue possible. Il importe de pouvoir discerner le motif du déplacement, de service ou personnel. Cet objectif pourrait d’ores et déjà être atteint si les ministères de la défense et de l’intérieur émettaient un ordre de mission préalable pour les déplacements pour motif professionnel des militaires. L’utilisation de la carte de circulation étant ainsi, de fait, réservée aux déplacements personnels, il serait alors possible de connaître la valeur de l’avantage en nature conféré. Dès lors, rien ne s’opposerait plus au réexamen du fondement de l’exonération de prélè- vements sociaux et fiscaux de cet avantage en nature, dont la Cour a souligné en 2009 le caractère dérogatoire. Le « quart de place » s’inscrit par ailleurs dans un environnement incertain : l’ouverture à la concurrence des lignes ferroviaires internationales est susceptible d’entraîner, à terme, une remise en cause de la régularité de sa compensation par l’Etat. Le “quart de place” des militairesSynthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Recommandations réexaminer systématiquement le champ des bénéficiaires de la carte de circulation, afin d’en réserver l’octroi aux militaires subissant des contraintes spécifiques ; réexaminer le fondement du défaut de valorisation de l’avantage en nature que constitue « le quart de place » pour les déplacements d’ordre privé, conjointement entre les ministères chargés du budget et de la fonction publique, en vue de son intégration dans l’assiette des prélèvements sociaux et fiscaux ; poursuivre la démarche de modernisation des cartes de circulation d’ores et déjà amorcée et améliorer le contrôle interne. Au delà, le ministère de la défense doit s’interroger sur la pertinence du maintien du régime du « quart de place ». Le “quart de place” des militaires 60Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 61 Cour des comptes 21 Les particularités des rémunérations des réservistes militaires Une exonération d’impôt sur le revenu difficile à justifier Les rémunérations versées aux réservistes sont exonérées d’impôt sur le revenu. L’exonération fiscale des réservistes militaires a concerné, en 2008, plus de 60 000 personnes (gendarmerie comprise), pour une dépense fiscale de 6,4 M€. Pour justifier cette exonération, il n’est plus possible d’invoquer la nécessité de compenser l’obligation de participer à des périodes d’instruction obligatoires puisque cette obligation a pris fin avec la loi du 22 octobre 1999. Par ailleurs, la rémunération des réservistes ne saurait être assimilée à un défraiement susceptible d’être exonéré. Le maintien du traitement des agents publics réservistes Les agents publics qui s’absentent pour participer à des activités de la réserve conservent le versement de leur traitement, jusqu’à trente jours par année civile. Cet avantage accroît le coût de la réserve de plusieurs millions d’euros et explique certainement la surreprésentation des agents publics dans la réserve militaire. revenir sur cette exonération, qui heurte le principe d’équité fiscale entre militaires d’active et de réserve ; reconsidérer l’avantage dont bénéficient les agents publics et non les réservistes salariés du privé. RecommandationsSynthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 62 Cour des comptes 22 La SOVAFIM : un intervenant sans utilité réelle La société de valorisation foncière et immobilière (SOVAFIM) est une société anonyme dont le capital est entièrement détenu par l’Etat. Elle a été créée en 2006 afin d’accélérer les cessions de biens immobiliers de Réseau Ferré de France et de réaliser sur ces opérations des plus-values destinées à remonter vers le budget de l’Etat sous la forme de dividendes. La SOVAFIM a été conçue sur la base d’un projet de court terme et sans perspective claire. Sa mission première était d’apporter à l’Etat 350 M€ de recettes budgétaires en 2006 et autant en 2007. Aucun autre transfert de biens de RFF n’étant intervenu depuis, plusieurs élargissements du champ d’intervention de la SOVAFIM ont été réalisés par le législateur, dans le but d’étendre sa mission à la valorisation d’ensembles immobiliers appartenant à l’Etat et ses établissements publics. Toutefois, entre 2007 et 2009, l’activité de la SOVAFIM résultant de ces dispositions s’est limitée à trois opérations ponctuelles, effectuées à la demande de l’Etat. Les ambitions des dirigeants de la société, qui entendaient en faire un opé- rateur immobilier susceptible d’investir 1 Md€ en cinq ans, sont restées sans suite. Un projet de développement autonome a été remis en cause en l’absence de recapitalisation par l’Etat actionnaire. Les transferts de biens immobiliers dont la SOVAFIM a bénéficié, limités en nombre, ne lui ont pas offert de réelles perspectives de développement. L’activité de la SOVAFIM est devenue très limitée (4,5 M€ de chiffre d’affaires en 2009) et dès lors peu rentable, la rentabilité des capitaux propres (1 % en 2009) ne rémunérant plus le risque de l’activité. Sa dépendance à l’égard des décisions de l’Etat, qui déterminent son niveau d’activité, limite ses marges de manœuvre, et elle n’est de fait qu’un démembrement de l’administration. N’ayant en définitive pour seul client et interlocuteur que l’Etat lui-même, cette société, dont la surface financière est trop étroite pour lui permettre d’acqué- rir un portefeuille significatif de biens à gérer et qui sous-traite l’essentiel de son activité de cession à des courtiers, est une structure intermédiaire sans client et sans projet de long terme. mettre un terme à l’existence de cette société sans utilité réelle. recommandationSynthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 63 Cour des comptes 23 Le nouveau siège de l’Office Paris Habitat Premier office public de l'habitat de France (plus de 117 000 logements), Paris Habitat disposait d'un siège social situé rue du Cardinal Lemoine dans le 5ème arrondissement de Paris qui ne pouvait accueillir l'ensemble de ses services, dont plusieurs étaient donc installés dans des immeubles pris en location. Pour les réunir en un site unique, le conseil d'administration de l'office a décidé, en décembre 2003, de vendre le siège social et d'acquérir, en copropriété, un immeuble situé rue Claude Bernard, toujours dans le 5ème arrondissement, précédemment utilisé par le quotidien le Monde. Les services informatiques n'ont toutefois pu être en totalité accueillis rue Claude Bernard. Une défaillance du pilotage entraînant une dérive des coûts et des délais Le coût du projet est passé de 90 M€ à 139,4 M€ entre l'hypothèse de départ présentée au conseil d'administration en mars 2004 et l'estimation fournie en mai 2008, un mois avant l'installation effective dans le nouveau siège, soit quatre ans et demi alors qu'un délai de réalisation de deux ans était initialement prévu. Cette dérive des coûts et des délais paraît imputable à un pilotage défaillant du projet laissant place à de nombreuses modifications qui auraient pu être anticipées : les hésitations qui ont caractérisé la réalisation du désamiantage du bâtiment sont à cet égard illustratives. Des performances peu satisfaisantes en terme de développement durable Malgré un souci affiché du développement durable, les performances du nouveau bâtiment suscitent des interrogations au terme de sa première année d'utilisation, les charges d'électricité et de chauffage ayant presque doublé par rapport à celles des trois anciens sites. Une approche par le coût global de longue période La direction de l'Office a avancé que, compte tenu des dépenses évitées du fait de l'abandon des anciennes implantations, le coût « net » du projet devrait se situer entre 29 et 34 M€. L'évaluation réalisée pour la chambre régionale des comptes, à partir du calcul du coût global sur 40 ans du nouveau siège, établit le coût « net » à 55 M€, soit l'équivalent de 240 logements sociaux. Le nouveau siège de l’Office Paris Habitat Le calcul d'un loyer fictif de l'opération pour permettre une comparaison avec les loyers pratiqués dans Paris, comme le ferait un promoteur, situe ce loyer au-dessus des loyers les plus élevés du 5ème arrondissement et au niveau de la zone la plus chère de Paris pour l'immobilier de bureau. Il est regrettable que, pour une opé- ration de cette envergure, un grand organisme, dont le métier est de construire et de gérer des logements, n'ait pas retenu d'emblée une approche fondée sur le coût global de longue période. Il aurait ainsi pu comparer plusieurs options et intégrer, de façon pertinente, les impératifs du développement durable. Ainsi que l'Office l'admet, cette approche demeure indispensable, tout au long de la période d'utilisation du bien immobilier, afin de suivre et de maîtriser au mieux les dépenses. mener, dès l’amont de toute opération d’envergure, une approche fondée sur le coût global de longue période. C’est en se référant à ce coût global qu’il est possible de comparer plusieurs options et d’intégrer, de façon pertinente, les impératifs du développement durable ; pratiquer cette même approche tout au long de la période d’utilisation du bien immobilier, afin de mieux suivre les dépenses et de mieux les maîtriser dans l’intérêt conjugué des finances publiques et de l’environnement. Recommandations Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 6465 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 24 Les exonérations des indemnités versées aux arbitres et juges sportifs : un instrument inadapté La loi du 23 octobre 2006 a précisé le régime juridique des 196 000 arbitres et juges sportifs et défini les modalités d’exonération fiscale et sociale des indemnités qui leur sont versées. Elle prévoit que leurs indemnités sont exonérées de charges sociales - patronales et salariales - dans la limite de 14,5 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 5 020 € en 2010. Elles sont exonérées d’impôt sur le revenu si leur montant annuel est inférieur au même plafond. Un régime déclaratif peu fiable Le régime de déclaration retenu par la loi présente des limites manifestes. Sur le plan fiscal, il incombe en effet aux seuls arbitres - et non aux organismes qui les rémunèrent (clubs sportifs, fédé- rations sportives, organisateurs de compétitions) - de déclarer les indemnités arbitrales qui dépassent le plafond du dispositif. Sur le plan des cotisations sociales, les fédérations sportives et les ligues professionnelles doivent théoriquement déclarer les indemnités versées : toutefois, les arbitres ne sont tenus de les informer qu’à partir du dépassement du plafond, et ils ne leur transmettent qu’à leur demande les formulaires sur lesquels ils doivent recenser l’intégralité des sommes perçues. En pratique, ce régime déclaratif dépend donc de la qualité, de la fréquence et du caractère exhaustif des informations transmises par les arbitres : les fédérations sportives et les ligues professionnelles ne sont pas en mesure de s’assurer à tout moment de la correcte application des dispositions d’exonération, contrairement à leur responsabilité que définit la loi. En outre, des interprétations divergentes se manifestent dans l’application de ces dispositions. Ainsi, alors que l’exonération fiscale ne doit concerner que les montants de rémunération infé- rieurs au plafond, certaines fédérations - telles que la fédération française de football - interprètent de manière irrégulière les dispositions de la loi du 23 octobre 2006, en accordant également le béné- fice de cette exonération aux arbitres dont les indemnités sont supérieures à 5 020 € par an. Un dispositif mal suivi Toute tentative de chiffrage du coût fiscal et social du dispositif est frappée d’incertitude en raison, non seulement du caractère déclaratif des rémunéra-Le exonérations des indemnités versées aux arbitres et juges sportifs : un instrument inadapté tions perçues, mais aussi de la méconnaissance du nombre exact d'arbitres et de leur statut (professionnel ou béné- vole à titre complet ou partiel). Dans ces conditions, les hypothèses arrêtées par l’administration pour chiffrer ces dépenses fiscales et sociales ne sont pas homogènes. Au total, les écarts de chiffrage du coût global de ce dispositif - entre 37,5 M€ et 134 M€ selon les hypothèses retenues par les différents services et organismes concernés - révèle la défaillance de son suivi, et corrélativement l'incapacité qui en résulte pour l'Etat de s’assurer de l'impact de ces mesures d’exonération. Pourtant, le coût des exonérations en faveur des arbitres représente, selon les évaluations, entre 15 % et 54 % du programme budgétaire « Sports » (dont les crédits s’élevaient à 246,7 M€ en 2010). Une efficacité non mesurée Il est difficile d’établir un lien direct entre l’évolution du nombre d’arbitres et ces mesures d’exonération. En effet, si le coût global de ce dispositif est élevé - quel que soit le chiffrage retenu -, l’avantage pécuniaire qu’il procure à titre individuel à chaque arbitre est limité, et ne saurait constituer, à lui seul, une incitation suffisante pour expliquer un accroissement notable des vocations arbitrales. De surcroît, une part importante des arbitres amateurs n’est pas concernée par ces mesures d’exonération : la part du bénévolat, qui, par construction, n’est pas concernée, est estimée par l’AFCAM à 40 % du corps arbitral, soit environ 78 000 arbitres en 2010. En définitive, la loi du 23 octobre 2006 a clarifié le statut des arbitres et des juges sportifs. Toutefois, l’absence d’objectif clairement défini pour ces mesures d’exonération se double d’une absence de pilotage et d’évaluation du dispositif par la direction des sports. En fait, l’Etat renvoie aux fédérations sportives la responsabilité d’encadrer les modalités de rémunération des arbitres : la mise en œuvre du dispositif d’exonération de la loi du 23 octobre 2006 ne s’est ainsi accompagnée d’aucune réflexion sur le régime indemnitaire des arbitres. Dans ces conditions, les dispositifs d’exonération sociale et fiscale créés par la loi du 23 octobre 2006 ne s’inscrivent pas de façon claire et cohérente dans le cadre de la politique mise en œuvre par l’État dans le domaine du sport : aucun des objectifs fixés par le programme budgétaire « Sport » n’amène à considé- rer qu’une partie de la rémunération des arbitres et des juges sportifs aurait vocation à être financée par le budget de l’État et par le régime général de la sécurité sociale. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 6667 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes La Cour souligne le rôle essentiel joué par les arbitres dans l’apprentissage et l’organisation des activités sportives, de même que les difficultés considérables qu’ils rencontrent dans l’exercice de leurs fonctions. Elle observe toutefois que les situations auxquelles ils sont confrontés sont très dissemblables et devraient appeler des solutions différentes. Dans ces conditions, l’inadaptation fondamentale de ce dispositif d’exoné- rations généralisées amène la Cour, compte tenu de l’importance disproportionnée de son coût global par rapport aux crédits budgétaires du programme « Sport », à recommander sa suppression. Recommandations Le exonérations des indemnités versées aux arbitres et juges sportifs : un instrument inadaptéCour des comptes 68 25 Le musée national du sport : un projet mal suivi Le musée du sport, simple service du ministère chargé des sports depuis sa création en 1963, n’a été transformé en établissement public administratif qu’en mars 2006. Malgré près de 600 000 objets et documents, qui forment l’une des plus importantes collections au monde portant sur l’histoire des sports, ce musée reste très peu connu et très faiblement fréquenté. Au terme de son contrôle, la Cour a dressé trois constats qui expliquent ce paradoxe : Une institutionnalisation tardive et confuse La transformation du musée en établissement public a été laborieuse. Il a fallu un an pour que le nouvel établissement soit doté d’un conseil d’administration et d’une comptabilité opérationnelle. Pendant ce temps, le responsable du musée a recouru à une société privée, avec laquelle il a signé une convention en mars 2005, pour organiser des expositions itinérantes et recruter des agents, alors qu’il ne disposait pas de délégation de signature pour ce faire. Les services du ministère des sports ont insuffisamment exercé leur responsabilité de tutelle. Alors qu’un rapport d’inspection générale révélait des anomalies dès octobre 2006, la convention n’a été résiliée qu’en août 2007 à la demande, non pas des services ministériels, mais du contrôleur financier Une absence d’implantation pérenne Le musée national du sport n’a jamais bénéficié d’une implantation pérenne. En 1979, ce « musée virtuel » a été installé, à titre précaire, dans l’enceinte du Parc des Princes, mais il a fallu attendre 1988, pour que des « galeries nationales » du musée y soient inaugurées, ce qui a permis une présentation permanente au public jusqu’en 1997. Toutefois, la préparation de la Coupe du monde de football de 1998 a eu pour conséquence de resserrer les locaux du musée et de fermer ses salles d’exposition. Plusieurs projets d’implantation du musée ont alors été envisagés. Une stratégie pour les collections peu claire Le musée n’a donc pu présenter, depuis juillet 2008, que 350 objets dans des locaux, appelés « vitrine », situés au rez-de-chaussée d’un immeuble loué par le ministère. Cette présentation n’attire qu’un public restreint (en moyenne, moins de 50 visiteurs par jour). De nombreuses difficultés et des surcoûts notables ont affecté cette implantation. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes69 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Alors qu’elle aurait dû être achevée début 2006, la « vitrine » ne l’a été qu’en juin 2008. L’enveloppe financière initiale (3,5 M€) a été largement dépassée (4,4 M€). En définitive, la présentation de chacun des 350 objets exposés a coûté plus de 12 000 euros. L’usage à venir de la « vitrine » reste incertain. Le ministère a fait part d’un projet d’implantation du musée à Nice, au sein d’une « Cité nationale des sports » : un protocole d’accord a été signé en mai 2010 avec la ville de Nice, mais il ne règle pas la question de la prise en charge du coût de la « vitrine », dont le ministère a supporté le financement pour un usage peut-être temporaire. Une dernière difficulté concerne les collections du musée. Celles-ci sont en effet consacrées à l’histoire de toutes les disciplines sportives, appréhendée à travers les compétitions, les pratiques de loisirs et la place des phénomènes sportifs dans la société. Cette orientation explique la présence d’objets parfois singuliers, tels qu’un camion publicitaire d’un Tour de France, ou répétitifs, comme de nombreux maillots et accessoires dédicacés par des champions. L’étendue de ces collections exige la définition d’une stratégie d’acquisition. Les premières avancées Il a pourtant fallu attendre de nombreuses années pour que le musée s’engage dans la définition d’un projet culturel et scientifique, qui n’a été validé par le conseil d’administration qu’en novembre 2010. L’actuelle direction du musée national du sport s’efforce désormais de surmonter les défaillances constatées au cours de la décennie écoulée. En témoignent le contrat de performance signé en février 2010 avec le ministère des sports, le protocole d’accord conclu en vue de l’implantation à Nice ou la préparation d’un projet scientifique et culturel. Toutes ces démarches restent toutefois à concrétiser : à défaut, il serait indispensable de s’interroger sur l’avenir de ce musée. Le musée national du sport : un projet mal suivi trouver la solution appropriée pour réduire les coûts très élevés que le ministère chargé des sports a engagés dans la « vitrine », qui constitue une installation précaire devenue sans objet, du fait de la perspective d’implantation du musée à Nice ; si les avancées annoncées ne se matérialisaient pas, s’interroger sans délai sur l’avenir de ce musée. RecommandationsSuites données aux observations des juridictions financières Synthèses du tome 2 71_______________________________ (1)Office national de l’eau et des milieux aquatiques Cour des comptes 26 Les services publics d’eau et d’assainissement : des évolutions encourageantes Dans son rapport thématique de 2003 consacré à la gestion des services publics d’eau et d’assainissement, la Cour recommandait une gestion intercommunale, afin de renforcer les économies d’échelle, la transparence financière et le pilotage de ces services. Sept ans plus tard, malgré des progrès constatés, d’importants efforts de rationalisation restent à accomplir. Les suites données aux recommandations de la Cour : les progrès initiés par le Gouvernement et le Parlement Parmi ces progrès, le décret du 14 mars 2005 a normé la présentation et le contenu du compte annuel de résultat de l'exploitation (CARE). La loi du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques a quant à elle facilité la programmation et le pilotage budgétaires. Les obligations du délégataire ont également été renforcées, notamment lors du renouvellement des installations. Enfin, la loi a créé un système d’information sur les services publics d’eau et d’assainissement (SISPEA). Les efforts des collectivités territoriales Ces efforts engagés pour améliorer la gestion des services d’eau et d’assainissement se manifestent par le développement des capacités d’expertise. Cellesci permettent une plus grande transparence dans le choix du mode de gestion, la réduction de la durée des contrats de délégation, une remise en compétition plus rapide ainsi que l’insertion de clauses contractuelles permettant un contrôle réel des conditions d’exécution. Les progrès restant à accomplir : un nombre excessif de services Des insuffisances persistent, notamment en termes de coûts, du fait du nombre trop élevé de services d’eau et d’assainissement. Selon l’ONEMA(1) , la France en compterait 35.000, un nombre sans équivalent en Europe. Les dispositions législatives adoptées depuis 2003 pour favoriser leur regroupement Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 7273 Les services publics d’eau et d’assainissement : des évolutions encourageantes Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes n’ont guère modifié ce maillage territorial. Ce surnombre engendre des difficultés pour l’alimentation du SISPEA, ses objectifs de fiabilité et d’exhaustivité étant difficilement compatibles avec l’actuel morcellement des structures. Un nécessaire rééquilibrage des relations entre collectivités et délégataires Du fait de l’asymétrie dans la connaissance des réseaux, les collectivités ne maîtrisent pas réellement les rené- gociations de contrats, ce qui explique le faible taux de changement d’opérateur. De même, le compte rendu financier du délégataire, souvent bref et lacunaire, ne permet pas la comparaison entre résultats réels et prévisionnels. Les syndicats d’eau et d’assainissement et les collectivités de taille modeste étaient traditionnellement assistées par les services de l’Etat en matière d’ingénierie publique, mais un arrêt quasi-total de ces prestations est prévu à l’horizon 2011. En conclusion, seule la réduction drastique du nombre de structures et la mutualisation des moyens et compé- tences permettront d’améliorer la gestion, et de rééquilibrer les rapports entre les collectivités et les délégataires de service public. rendre obligatoire l’ouverture d’un compte de trésorerie propre, pour les DSP ; autoriser le placement des excé- dents réalisés par la mise en œuvre des dispositions de l’article L. 2224-11-1 du CGCT ; mettre en œuvre effectivement les nouvelles normes comptables de l’instruction M49 applicable aux services d’eau et d’assainissement ; déterminer par voie réglementaire le contenu et la présentation du CARE du délégataire, pour le rendre comparable au compte d’exploitation prévisionnel annexé au contrat ; reporter au 30 septembre la pré- sentation du rapport annuel sur le prix et la qualité du service, afin de permettre à l’autorité organisatrice de mener une expertise au fond des informations transmises par le délégataire ; afin de disposer d’une base de données sur l’eau pertinente sur l’ensemble de la France, améliorer le fonctionnement du système d’information sur les services publics d’eau et d’assainissement, en instaurant une obligation de transmission de l’ensemble des indicateurs de performance pour les services publics les plus significatifs au plan national. RecommandationsCour des comptes 74 27 Les organismes faisant appel à la générosité publique La mission confiée par le législateur à la Cour Le législateur a souhaité, en 1991, que la Cour puisse « exercer un contrôle du compte d’emploi des ressources collectées auprès du public dans le cadre de campagne menées à l’échelon national […] afin de vérifier la conformité des dépenses […] aux objectifs poursuivis par l’appel à la générosité publique ». Dès ses premières enquêtes, la Cour ne s’est pas tenue à la seule vérification comptable du compte d’emploi et de ressources. Elle a considéré qu’il relevait de sa mission d’examiner les actions conduites et leur pilotage, ainsi que les procédures mises en place et les modalités de gestion. Vérifier la conformité des dépenses engagées aux objectifs poursuivis par les campagnes suppose, en effet, de contrôler, en amont, l’information donnée aux donateurs potentiels sur l’utilisation qui sera faite des fonds collectés, et, en aval, la nature, les modalités de réalisation et les résultats des actions financées. La Cour a aussi tenu à rendre compte de ses contrôles aux donateurs en publiant systématiquement le résultat de ses investigations Des recommandations largement suivies d’effet Depuis 2004, la Cour a mis en œuvre différents types d’enquêtes pour s’assurer du suivi de ses recommandations : 1. de nouveaux contrôles exhaustifs (trois cas) : deux des trois rapports parus entre 2004 et 2007 ont relevé des changements considérables ou des amé- liorations significatives ; 2. des enquêtes de suivi ciblé (cinq cas) : les rapports publiés en juin et septembre 2009 ont montré que les associations contrôlées avaient largement pris en compte les recommandations de la Cour, à l’exception notable de la Société protectrice des animaux. L’administrateur judiciaire de la SPA, nommé à la suite de ce contrôle, rend compte de ses diligences dans le présent rapport ; 3. un contrôle de l’emploi du reliquat de la collecte affectée aux victimes du tsunami du 26 décembre 2004 : sur les 29 organismes de nouveau examinés en 2009, 19 ont vu leurs dépenses « tsunami » 2006-2008 déclarées conformes, Synthèses sans réserve, à l’objet de l’appel. du Rapport public annuel de la Cour des comptes75 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes La Cour a ainsi pu constater que ses observations étaient largement suivies d’effet. Elle a aussi profité de sa dernière publication pour rappeler que, dans le cas d’une collecte affectée : - tous les dons reçus doivent, jusqu’à leur épuisement, être traités comptablement comme des fonds dédiés ; - ils doivent être employés conformément à ce qui a été annoncé au donateur potentiel, donc – sauf mention expresse dans l’appel - exclusivement pour la mission sociale ; - si les fonds sont conservés suffisamment longtemps par l’organisme pour que leur placement dégage des produits financiers, ceux-ci doivent bénéficier aux actions, au même titre que les dons provenant de la collecte. L’élargissement de la compétence de la Cour L’article 20 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2009 a permis deux novations : 1. Il a étendu la compétence de la Cour au contrôle de la conformité entre les objectifs des organismes bénéficiant de dons ouvrant droit à un avantage fiscal et les dépenses financées par ces dons, lorsque le montant annuel de ceux-ci excède 153 000 € ; 2. Il a introduit une possibilité de sanction : lorsqu’il reçoit de la Cour une déclaration de non-conformité, le ministre chargé du budget peut désormais « suspendre de tout avantage fiscal les dons, legs et versements effectués au profit de l'organisme visé dans la déclaration ». En matière de générosité publique, la Cour a toujours eu pour objectif le contrôle du respect de la volonté du donateur, et elle a considéré le donateur – ou le donateur potentiel - comme le premier destinataire des travaux de la Juridiction. Elle conservera cette préoccupation dans l’exercice de la mission élargie que la loi lui a récemment confiée vis-à-vis des organismes bénéficiant de dons ouvrant droit à avantage fiscal. Les organismes faisant appel à la générosité publique28 La «décristallisation» des pensions des ressortissants des territoires autrefois sous souveraineté française Des pensions restées figées dans leur montant La Cour constatait en 2010 que les pensions servies aux anciens combattants des territoires anciennement sous la souveraineté française étaient restées figées, dans leur montant comme dans leur forme juridique, à la date des indé- pendances. Cette situation de fait, dérogatoire au droit commun des pensions, était source d’inégalités de traitement persistantes, entre Français et étrangers d’une part, et entre les différentes nationalités concernées d’autre part. En conséquence, la Cour préconisait un alignement intégral du régime des « cristallisés », qu’il s’agisse des pensions d’invalidité ou des pensions civiles et militaires de retraite, sur le régime de droit commun français. L’alignement sur le droit commun A la suite de la décision du Conseil constitutionnel du 28 mai 2010 sur la première question prioritaire de constitutionnalité qui lui était posée, et de l’adoption de l’article 211 de la loi de finances pour 2011, suivie du décret n° 2010-1691 du 30 décembre 2010, cette recommandation a été prise en compte. A compter du 1er janvier 2011, toutes les pensions militaires d’invalidité, les pensions civiles et militaires de retraite et les retraites du combattant, servies aux ressortissants des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France, sont calculées sur la base du régime de droit commun. La Cour s’assurera de la bonne mise en œuvre de ce nouveau dispositif, notamment en matière d’information des bénéficiaires potentiels sur les démarches qu’ils doivent entreprendre pour faire réviser le niveau de l’indice servant au calcul de leur pension. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 76Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 77 29 Les autorités de régulation financière La Cour a contrôlé, à partir de juillet 2006, les trois principales autorités de contrôle et de régulation financière qui sont la Commission bancaire, l’Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles (ACAM) et l’Autorité des marchés financiers (AMF). Elle a procédé, dans son rapport public annuel de février 2009, à une évaluation comparée de ces trois autorités. La crise bancaire mondiale qui s’est développée à partir de l’automne 2008 a mis en lumière le rôle crucial que devait jouer un système de régulation financière responsable et adapté, et les réponses apportées par les autorités françaises, dans le cadre des principes d’action dégagés au niveau international, se sont inscrites dans la ligne des recommandations que la Cour avait émises à l’occasion de ses enquêtes. Ainsi, l’ordonnance n°2010-76 du 21 janvier 2010 a procédé à la simplification des structures de contrôle et de régulation que la Cour estimait opportune, et elle a aménagé de nouvelles obligations de surveillance dans la protection des épargnants, qui avait été un thème particulièrement examiné par la Cour. La loi de régulation bancaire et financière du 22 octobre 2010 a, pour sa part, consacré des avancées substantielles concernant l’organisation de la surveillance des risques systémiques et le renforcement des pouvoirs des autorités, dont les modalités concrètes satisfont, dans leur ensemble, les préconisations de la Cour. Cour des comptesCour des comptes 30 Les services centraux chargés de l’outre-mer En 2006, la Cour observait notamment que les deux services du ministère de l’outre-mer, la direction des affaires politiques, administratives et financières (DAPAF) et la direction des affaires économiques, sociales et culturelles (DAESC), assuraient mal la coordination interministérielle, tandis qu’ils géraient des crédits ne représentant qu’une part minoritaire de ceux consacrés à l’outre-mer. La création de la délégation générale à l’outremer (DéGéOM) La DAPAF et la DAESC ont été placées en mai 2007 sous l’autorité du ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, le secrétaire d’Etat à l’outre-mer en disposant en tant que de besoin. Puis, elles ont été remplacées en septembre 2008 par la DéGéOM. La mise en place de la DéGéOM a été laborieuse : calendrier contraint, désignation tardive du préfigurateur, accompagnement insuffisant des ressources humaines, difficultés à pourvoir les postes. Fin 2008, l’effectif était très inférieur à celui prévu, composé pour moitié d’agents nouveaux, et la passation des dossiers était parfois problématique. Le resserrement de l’organisation A la suite des recommandations de la Cour, c’est une direction d’administration centrale unique qui a été mise en place, et structurée autour de trois fonctions : coordination des politiques publiques, fonctions juridiques et institutionnelles, évaluation et prospective. L’essentiel des « fonctions support » a été transféré aux services compétents du ministère de l’intérieur, avec les emplois correspondants, ce qui permet des économies d’échelle. L’articulation entre la DéGéOM et les autres services du ministère fonctionne désormais correctement. Un rôle interministériel à affirmer La DéGéOM conserve la gestion de la mission budgétaire “Outre-mer”, gère de nombreuses subventions et abrite le service de l’état-civil de l’outre-mer et l’état-major du service militaire adapté. Mais sa fonction d’impulsion et de coordination interministérielle reste fragile : absence de réunion de la commission interministérielle de coordination des investissements publics ; secrétariat du comité interministériel de l’outre-mer assuré par le secrétariat général du gouSynthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 7879 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes vernement ; articulation peu claire avec la DATAR pour la politique contractuelle. En outre, de fortes contraintes de productivité ont été imposées à la délé- gation, réduite de 83 emplois, dont seulement 46 correspondent au transfert des fonctions support, alors même que la part relative des catégories supérieures n’y a pas progressé. Ni le nombre, ni le profil des emplois mis à disposition par d’autres ministères ne sont précisés, et l’interministérialité des recrutements ne s’est pas accrue. Dans ses deux premières années, la DéGéOM a été confrontée à la crise aux Antilles et a dû assurer le suivi complexe du projet de LODEOM. Trois délégués généraux se sont succédé, et le ministre de l’intérieur et le secrétaire d’Etat chargé de l’outre-mer ont changé. Les services de la DéGéOM ont été écartés de la phase consultative de l’organisation des “états-généraux de l’outremer”. Le cabinet du ministre chargé de l’outre mer comprend une soixantaine d’agents, dont une dizaine de cadres, à comparer à une DéGéOM dont les effectifs ont diminué. Les réunions interministérielles se tiennent rarement en présence du délé- gué général. Les relations avec plusieurs ministères sont difficiles, l’information circule mal et certains ministères ne respectent pas les règles et délais de saisine fixés par le Premier ministre ; d’autres n’ont pas encore désigné de correspondant. Les services centraux chargés de l’outre-mer réunir les conditions pour que la DéGéOM exerce au mieux sa mission : - facilitation du recrutement des agents issus d’autres ministères; - appui de son action par le rappel à l’ordre quant aux règles de saisine et la désignation systématique de correspondants ; - stabilité dans le temps de son équipe de direction. RecommandationsCour des comptes 80 31 Le Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM) La Cour a examiné à plusieurs reprises les comptes et la gestion du Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM), établissement public industriel et commercial. Une gestion critiquée Le contrôle précédent, portant sur les exercices 1999 à 2002, au cours desquels le BRGM exerçait des activités d’exploitant minier, avait conduit la Cour à adresser aux ministres de tutelle un référé portant sur trois points : - la nécessité de définir les nouvelles missions du BRGM et d’assurer son équilibre financier futur ; - une gestion plus rigoureuse, notamment en mettant fin aux dysfonctionnements comptables liés à la difficile mise en place d’un progiciel ; - les conséquences financières de l’engagement dans la construction d’une usine de traitement de nickel en Nouvelle-Calédonie. Des améliorations importantes Le dernier contrôle, portant sur les exercices 2003 à 2008, a permis de constater que les recommandations de la Cour ont été largement suivies. Le décret du 20 septembre 2004 a défini les nouvelles missions du BRGM, autour de trois axes : la recherche dans le domaine des géosciences, l’expertise au profit des autorités publiques dans le même domaine et les activités internationales. Des contrats quadriennaux définissent les objectifs du BRGM dans le cadre de ses nouvelles missions. Cette nouvelle stratégie a permis à l’établissement de redresser ses comptes : son résultat d’exploitation est devenu positif dès 2004 pour s’élever à 10,6 M€ en 2008. En outre, le BRGM a amélioré sa gestion et ses logiciels comptables fonctionnent correctement. S’agissant des risques que le BRGM pouvaient courir du fait de son engagement dans un projet d’usine de nickel en Nouvelle-Calédonie, l’établissement a cédé sa participation dans ce projet à la société de participation minière du sud, société à l’encontre de laquelle il dispose désormais d’une créance de 67,4 M€, couverte par une provision de 10 M€. Cette provision a été jugée insuffisante par les commissaires aux comptes. Un risque résiduel subsiste donc dans ce domaine. Toutefois, la création, pendant la période examinée, d’une école d’application des géosciences apparaît d’un inté- rêt des plus limités. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes81 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes réformer l’organisation du BRGM pour créer une direction financière de plein exercice et modifier les fonctions de la direction de la production ; en matière financière, améliorer les procédures de contrôle interne et d’audit. Recommandations Le Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM)32 Le personnel de la navigation aérienne La Cour a examiné à plusieurs reprises la gestion des ressources humaines à la direction générale de l’aviation civile (DGAC) : en 2002 (rapport public thématique), en 2006, puis en 2010. Dans son rapport public annuel de 2010, la Cour dressait un constat sévère, notamment sur l’opacité de l’organisation du travail qui posait des problèmes de productivité et de sécurité. Un an après la publication de ce rapport, la DGAC a mis fin aux pratiques les plus contestables et a régularisé les régimes indemnitaires de ses agents. Depuis juin 2010, un système de vérification permet de connaitre les heures de contrôle réellement effectuées par chaque agent. Il a été ainsi mis fin au système d’absences officieuses (clairances) mis en place par les contrôleurs aériens, à la faveur d’une organisation du travail opaque. Des difficultés ont été rencontrées localement, mais elles sont restées limitées, malgré l’émotion qu’a suscitée la mise en place de ces vérifications. Ces mesures constituent une avancée importante. Toutefois, la Cour avait constaté que cette même opacité n’avait pas permis à la direction de la sécurité de l’aviation de disposer des procédures nécessaires pour s’assurer de l’aptitude des contrôleurs à exercer leur métier. Un an après, les informations dont dispose la direction de la sécurité sont toujours lacunaires. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 82Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 83 33 Le CNRS dans le nouveau paysage de la recherche Dans son rapport public de 2007, la Cour avait fait le constat que le Centre National de Recherche scientifique (CNRS) n’était pas parvenu à redéfinir son positionnement dans un paysage de la recherche en forte évolution. En 2010, la Cour a souhaité faire le bilan de la mise en œuvre de ses recommandations. Une gouvernance réformée Le décret du 29 octobre 2009 confie au président du CNRS la direction générale de l’établissement. En application de ces dispositions, un président directeur général a été nommé le 20 janvier 2010. Le contrat d’objectifs signé avec l’Etat le 19 octobre 2009 a été rapidement suivi d’effets, avec en particulier la création de dix instituts disciplinaires, début 2010, en lieu et place des anciens départements scientifiques. Il est cependant privé de toute déclinaison financière chiffrée. Des avancées à poursuivre Pour mettre en œuvre des partenariats rénovés et équilibrés par sites universitaires, les fonctions qui demeureront au sein du CNRS doivent être pré- cisées ; ce dernier doit également se doter de modes gestion et d’instruments de pilotage modernisés. Si la modernisation comptable est en voie d’achèvement, les comptes du CNRS ayant été certifiés avec réserves depuis 2008, la modernisation budgé- taire reste à concrétiser. Ce n’est qu’à compter de 2010 qu’ont été mises en place les procédures rénovées qui auraient dû accompagner la mise en œuvre de la LOLF. Deux questions restent à régler : le niveau des reports et l’affectation des crédits aux unités de recherche. Une adaptation partielle des instruments de pilotage Les systèmes d’évaluation ont été mis en cohérence. Des interfaces entre les systèmes d’information des partenaires du CNRS dans ses unités mixtes de recherche, soit 90 % des 1000 unités que compte le Centre, doivent être créées. Enfin, le CNRS dispose d’un directeur scientifique référent sur les grands sites universitaires. Certains dispositifs permettant d’assurer des passerelles entre activités de recherche et activités d’enseignement ont vu le jour, mais ils ne concernent à ce stade que des effectifs limités. Dans le même temps, l’accueil d’enseignantsLe CNRS dans le nouveau paysage de la recherche chercheurs en délégation ne s’est pas développé et les résultats en matière de recrutement d’enseignants chercheurs par le CNRS sont inquiétants. La gestion des unités de recherche : une réforme à conduire d’urgence Dans les unités mixtes, c’est-à-dire dans 90 % des laboratoires, le CNRS ne dispose qu’une fois tous les quatre ans d’une vision consolidée des moyens humains et financiers. Malgré une priorité affichée, les réalisations obtenues à ce jour sont particulièrement limitées. Ceci suppose que soit réglée la question des personnels affectés à ces tâches au CNRS. Il faudra également que le nouveau système permette aux établissements d’assurer le pilotage financier de leur gestion. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 84 Participer activement à l’émergence de pôles universitaires d’excellence ; Développer les passerelles entre les emplois de chercheurs et d’enseignants-chercheurs en se donnant des cibles ambitieuses et mesurables ; Réformer d’urgence la gestion financière des unités mixtes de recherche ; Régler dans les prochains budgets la question des reports et de l’affectation des crédits aux unités de recherche. Recommandations85 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 34 La préparation et le suivi de l’exécution du budget de l’Etat Dans les rapports qu’elle établit annuellement sur les résultats et la gestion budgétaire de l’Etat ainsi que sur les ouvertures et annulations de crédits opérées par voie réglementaire, la Cour formule des recommandations relatives à la préparation et au suivi de l’exécution du budget de l’Etat. Le suivi de dix-sept d’entre elles met en évidence une évolution progressive mais encore trop limitée des pratiques. Plusieurs recommandations destinées à préciser le cadre d’exécution du budget de l’Etat, à renforcer le suivi des dépenses des opérateurs et à reclasser certaines recettes de l’Etat ont été assez largement mises en œuvre. Elles contribuent à clarifier l’information budgé- taire et à améliorer le pilotage de l’exécution. D’autres recommandations ont été partiellement mises en œuvre. Elles portaient notamment sur les insuffisances d’ouvertures de crédits en loi de finances initiale par rapport aux besoins prévisibles, la comptabilisation et le paiement des dépenses exigibles au cours de l’exercice, ou l’aménagement de la norme utilisée pour limiter l’évolution des dépenses de l’Etat. Il en est de même pour des recommandations sur le suivi et l’évaluation des dépenses fiscales et sur la gestion budgétaire : la période complémentaire qui permet de prolonger au-delà du premier janvier l’exécution des dépenses de l’exercice précé- dent a été réduite, les rapports annuels de performance sont établis plus rapidement après la fin de l’exercice et la budgétisation des dépenses en autorisations d’engagement s’est étendue. Les progrès constatés doivent être parachevés. Certaines recommandations n’ont pas encore été suivies d’effet notamment celles se rapportant à la comptabilisation de toutes les obligations juridiques nées au cours de l’exercice, à l’information du Parlement sur l’évolution de l’endettement à court terme ou encore au rattachement des comptes spéciaux concourant à la mise en œuvre d’une politique publique aux missions correspondantes du budget général. Le retard pris pour mettre en œuvre plusieurs des principales recommandations de la Cour ne résulte pas, dans la plupart des cas, d’une difficulté technique et elles devraient pouvoir être rapidement suivies d’effet afin d’améliorer la qualité de l’information budgétaire et de favoriser un meilleur pilotage financier des politiques publiques.35 Les effets de la certification des comptes de l’Etat Chaque année, la Cour a la responsabilité de fournir l’assurance que les comptes de l’Etat sont réguliers et sincères et donnent une image fidèle de son patrimoine et de sa situation financière, au regard du référentiel que constitue le recueil des normes comptables de l’Etat. Cette certification est un volet essentiel de la réforme voulue par le législateur organique dans le cadre de la LOLF. Elle doit garantir une information fiable du Parlement, des administrations et des citoyens. La crise économique et financière n’a fait qu’accroître la nécessité d’une pleine transparence des comptes. En assortissant ses certifications d’un nombre important de réserves, la Cour a choisi d’accompagner la mise en œuvre de la réforme, tout en délivrant au Parlement une information détaillée sur les limites des comptes de l’Etat. L’exercice 2009 : une année de progrès Dans son acte de certification, rendu public le 25 mai 2010, la Cour a décidé de lever trois réserves formulées sur les comptes du précédent exercice. Au total ce sont 10 réserves qui ont pu être levées en l’espace de trois ans (1). Malgré ces améliorations, neuf réserves, dont huit substantielles, ont été reconduites. La totalité des postes des états financiers reste affectée d’incertitudes, de désaccords, de limitations. Deux réserves ont un caractère structurel. Elles résultent de l’inadaptation des systèmes d’information financière et comptable de l’Etat et de l’insuffisante efficacité de ses dispositifs de contrôle interne. Deux réserves concernant les immobilisations financières visent le traitement comptable de la Caisse d’amortissement de la dette sociale et les incertitudes sur la valorisation des opé- rateurs de l’Etat à son actif. Trois autres réserves portent sur les actifs du ministère de la défense, la valorisation du parc immobilier de l’Etat et les immobilisations et stocks des ministères civils. Cour des comptes Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes ____________________________________ (1) De nouvelles réserves ayant par ailleurs été formulées au cours de la même période. 8687 Les effets de la certification des comptes de l’Etat Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Un pilotage des services de l’Etat qui reste essentiellement fondé sur une approche budgétaire L’enrichissement du suivi des opérations budgétaires, c'est-à-dire des seuls encaissements et décaissements de l’exercice, par des informations de nature patrimoniale demeure marginal. Ainsi, les éléments résultant de la meilleure connaissance comptable du parc immobilier, de l’amélioration du recensement des provisions pour risques et charges, du coût de détention et d’entretien des équipements nécessaires à la conduite des activités de l’Etat ne sont pas mobilisés à des fins d’aide à la décision. Pourtant, quelles que soient encore ses limites, la comptabilité générale peut d’ores et déjà fournir aux administrations des informations dont elles ne disposaient pas jusque là, utiles au pilotage de leur gestion. Ces données doivent maintenant être utilisées.36 Les mesures législatives concernant la sécurité sociale et les retraites Comme les années précédentes, la Cour des comptes a examiné dans quelle mesure les dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS), ainsi que celles, juste anté- rieures, de la loi portant réforme des retraites, reflétaient ses précédents travaux et ses recommandations. Plusieurs recommandations réité- rées de la Cour, qui portent sur des questions structurelles, ont fait l’objet de dispositions dans la loi de financement pour 2011. C’est en particulier le cas pour le financement des déficits, puisqu’est prévue une reprise de dette par la caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES), pour le suivi de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM), rendu plus rigoureux comme le souhaitait la Cour. La Cour relève cependant que les mesures décidées restent, en particulier pour la réduction des niches sociales, en deçà de ses préconisations et qu’elles n’ont pas eu d’effet significatif sur la réduction des déficits, qui constitue pour la Cour un impératif absolu. Plusieurs dispositions de la loi sur la réforme des retraites correspondent également à des préconisations, parfois anciennes, de la Cour. Dans deux cas, la loi annonce des études complémentaires pour aller dans le sens des préconisations de la Cour, d’une part pour une plus grande harmonisation des règles et des barèmes entre invalidité et handicap, d’autre part pour une réforme des compensations démographiques de la branche retraite. La LFSS prévoit, quant à elle, la suppression de la compensation démographique maladie, ce qui répond également à une recommandation de la Cour. Plusieurs dispositions permettent en outre une plus grande convergence entre les règles du régime général et celles applicables à la fonction publique : la réduction du délai minimal permettant de valider des droits à retraite dans la fonction publique, la suppression de la possibilité de départ en retraite pour les parents de trois enfants et plus, après 15 ans dans la fonction publique, ou encore la révision à la baisse des bonifications de durée d’assurance, prévues pour certaines catégories de fonctionnaires. Cour des comptes Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 8889 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 37 La Coface Dans une enquête conduite en 2008 à la demande de la commission des finances du Sénat, la Cour a contrôlé la Coface qui gère, pour le compte et avec la garantie de l’Etat, les opérations d’assurance des risques à l’exportation des entreprises français qui ne peuvent pas être réassurées sur le marché. Un renforcement de la demande de soutien des entreprises La crise économique l’explique largement. En 2008, la Cour avait relevé une tendance à la réduction des demandes des entreprises pour les procédures publiques de la Coface, principalement en ce qui concerne l’assurance crédit. Les garanties prises au titre de l’assurance crédit ont de fait triplé passant de 7,5 Md€ en 2008 à plus de 20 Md€ en 2009. La Cour recommande de transférer, au moins partiellement, à un opérateur bancaire cette procédure dont les coûts de gestion demeurent élevés. Une gestion plus performante Les recommandations que la Cour avait adressées pour améliorer la gestion des procédures publiques ont globalement été suivies, tant en ce qui concerne la rationalisation de l’organisation de la Coface pour l’instruction des demandes des entreprises que la meilleure identification des effectifs affectés à la gestion des garanties publiques. Mieux évaluer les risques Les recommandations relatives à l’appréhension des risques supportés par l’Etat formulées en 2008 ont pris une acuité nouvelle. De fait, les risques pris au titre de l’aéronautique, qui repré- sentent 20 % des engagements souscrits, ne sont pas correctement provisionnés. La Cour continue surtout de regretter que toutes les conséquences ne soient pas tirées, par l’Etat, du calcul réalisé pour déterminer le capital nécessaire pour faire face aux risques liés à l’assurance crédit. Elle réitère en consé- quence sa recommandation visant à définir le niveau des risques que l’Etat souhaite couvrir avec les capitaux propres du compte des procédures publiques de la Coface pour en déduire les prélèvements annuels qu’il peut faire sur la trésorerie du compte.38 La réorganisation de la collecte de la taxe d’apprentissage dans le secteur des transports et de la logistique A la suite du contrôle des organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage (OCTA) dans la branche du transport et de la logistique la Cour avait constaté des dysfonctionnements majeurs, dont elle a fait part, par référé du 23 juillet 2008, aux ministres chargés des transports, de l’emploi, de l’éducation nationale et du budget, qui exercent la tutelle de ces associations. Elle soulignait l’opacité du dispositif de collecte et relevait la constitution de « groupes de fait » autocontrôlés, aux activités parfois très éloignées de toute mission de service public, sans que ces dérives aient appelé de réactions des administrations concernées. La Cour recommandait donc une remise en ordre immédiate et profonde. L’organisation de la collecte a évolué depuis 2008 L’AFT (association pour la formation professionnelle dans les transports) est désormais le seul organisme collecteur de la taxe d’apprentissage, les autres associations ayant perdu leur agrément en 2009. L’organisation de ce groupe a elle-même été simplifiée : les 27 sociétés civiles immobilières qui en dépendaient ont été fusionnées en une seule et les diverses associations opérant dans le domaine de la formation continue ont été regroupées en un organisme unique. Une évolution inachevée La fixation des rémunérations de ses dirigeants continue à échapper au contrôle de la tutelle de l’AFT tandis que la transparence financière du groupe reste perfectible, faute à ce jour de comptes consolidés certifiés par un commissaire aux comptes. La distinction entre les activités de collecte et celles relevant du domaine concurrentiel (formation) reste imparfaite. La situation des OCTA gagnerait à se rapprocher de celle des organismes paritaires collecteurs des fonds de la formation professionnelle continue (OPCA), dont la collecte est la mission essentielle, à l’exclusion de toute activité de prestations de formation professionnelle. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 9091 La réorganisation de la collecte de la taxe d’apprentissage dans le secteur des transports et de la logistique Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes L’exercice de la tutelle reste marqué par d’importantes faiblesses Après une mobilisation consécutive au référé de la Cour, les ministères de tutelle ont peu fait évoluer leur pratique. Ils n’ont notamment pas mis en place un « comité d’engagement et de suivi », chargé d’approuver la répartition de la ressource fiscale affectée à l’AFT, alors même qu’ils s’y étaient engagés à la suite du référé de 2008, se privant ainsi d’un instrument de pilotage de cet opérateur. La Cour souligne la nécessité d’un renforcement de la vigilance des pouvoirs publics pour que soient conduites à leur terme les évolutions amorcées en 2009.39 Le GIP Habitat et interventions sociales pour les mal-logés et les sans-abri Dans un précédent contrôle inscrit au rapport public annuel de 1999, la Cour avait établi un bilan critique de l’exercice de ses missions de relogement par le « groupement d’intérêt public (GIP) habitat et interventions sociales pour les mal-logés et les sans abri ». Elle avait posé la question de la pérennité de cette structure. Finalement reconduit en 2003, le GIP a connu un très fort développement qui s’est traduit en 2007 par un doublement de la subvention de l’Etat. Son activité a été recentrée, et ses missions sont davantage encadrées. La Cour note que l’existence de cette structure apparaît justifiée en Ilede-France pour assurer le relogement d’urgence, et que les tutelles sont satisfaites de ses interventions. Le risque de lui voir confier des missions sans rapport direct avec son objet reste cependant bien réel. La Cour appelle l’attention sur les conséquences de l’augmentation du recours au mécanisme des baux glissants jusqu’en 2009. Elle recommande de mettre en place une sécurisation des recouvrements du GIP et de maintenir les moyens d’un contrôle de cette structure. La gestion interne du GIP doit encore être améliorée. Cour des comptes Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 9293 Cour des comptes Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 40 L’Ecole nationale de la voile et des sports nautiques L’examen des suites données aux recommandations que la Cour avait faites à l’issue de son contrôle de l’Ecole nationale de voile et des sports nautiques (ENVSN), pour les exercices 1995 à 2004, montre que, malgré des avancées, certains chantiers restent encore à engager. En outre, l’évolution du contexte dans lequel s’insère l’activité de l’Ecole appelle une réflexion plus large sur le devenir de cet établissement. De nouvelles formations et l’extinction des diplômes révolus L’Ecole devait repositionner ses formations sur la préparation aux nouveaux diplômes créés par le ministère chargé des sports, et inscrire l’accueil des sportifs de haut niveau dans le cadre d’une relation plus soutenue avec la fédération française de voile (FFV). L’Ecole a signé en juin 2009 une convention avec la FFV qui la reconnait comme un « Centre d’excellence nationale multi-ressources pour l’ensemble du haut niveau, et pour les supports voile légère, inshore, handivoile ». Sur cette base, la convention décline une série d’actions qu’il appartient à l’Ecole de mettre en œuvre en relation avec la Fédération. Certaines carences de pilotage demeurent Le pilotage de l’établissement souffrait de plusieurs carences : absence de projet d’établissement ; absence de lettre de mission au directeur de l’école ; absence d’outil global de contractualisation entre l’établissement et sa tutelle. La situation n’a que partiellement évolué : seul un contrat de performance entre le ministère et l’Ecole, pour la période 2010-2012, a été signé en novembre 2010. Certes, l’Ecole se trouve aujourd’hui dans une phase de transition qui rend encore difficile la détermination de ce que pourrait être un profil renouvelé d’activités. Mais, pour cette raison, la Cour insiste sur la nécessité d’élaborer un projet d’établissement qui doit permettre dès 2012 de déterminer le devenir de l’école. 94 L’Ecole nationale de la voile et des sports nautiques Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes La mauvaise connaissance des coûts La politique tarifaire de l’Ecole (prix des formations, des stages, de l’hôtellerie et de la restauration) n’était pas adossée à une connaissance de ses coûts. La Cour incitait donc l’établissement à mettre en place une comptabilité analytique. La situation n’a guère évolué puisque l’Ecole n’a toujours pas la comptabilité analytique lui permettant de disposer d’un référentiel fiable pour établir ses tarifs. Dès lors, ce devrait être un chantier prioritaire. Un faible niveau de fréquentation Le contrôle de la Cour a conduit à souligner la faible fréquentation de l’hô- tellerie et de la restauration dont dispose l’Ecole sur son site. Faute d’une comptabilité analytique précise, il est difficile d’apprécier les coûts induits par cette insuffisance globale de fréquentation. Une réflexion pourrait être opportunément menée sur les perspectives de cette activité et les moyens d’en réduire les coûts. Les logements pour nécessité absolue de service La Cour avait constaté que les conditions dans lesquelles étaient attribués six logements pour nécessité absolue de service souffraient d’une insuffisance de base réglementaire. Cette situation demeure. La tutelle de l’Ecole a réitéré son engagement à rédiger une circulaire pour mieux encadrer les conditions de logement dans ses établissements publics. L’activité de l’ENSV s’inscrit dans un cadre dont la structuration a été renforcée par la convention qui l’unit désormais à la fédération française de voile et le contrat de performance avec sa tutelle récemment signé. Elle doit mettre à profit le délai qui court jusqu’à l’échéance 2012 pour élaborer un projet d’établissement dont la consistance sera la condition de sa pérennité. 95 Cour des comptes Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 41 Chorus et les systèmes d’information financière de l’Etat Chorus est le plus grand projet informatique de gestion mené par l’Etat à ce jour. Il a pour objectifs principaux d’améliorer la gestion de l’Etat en la rendant plus efficace et de garantir la fiabilité des comptes de l’Etat. Lancé en 2006, Chorus doit être déployé sur l’ensemble du territoire, pour tous les services gestionnaires et comptables de tous les ministères (1) , en 2011. Ce déploiement concerne 35 000 utilisateurs. En 2012, la comptabilité générale de l’Etat, c’est-à-dire l’enregistrement et la valorisation de l’ensemble du patrimoine, des créances, des dettes et des engagements de l’Etat sans exception, doit être tenue par cette application. Un projet majeur dont le déploiement est difficile Chorus a connu des difficultés de déploiement. Début 2010, les dépenses de plusieurs ministères, à commencer par celui du ministère de la défense, ont connu des retards de paiement, d’un montant maximal évalué à 6 Md€ en juillet, qui ont provoqué des difficultés de trésorerie pour les fournisseurs de l’Etat. Ces retards n’étaient pas totalement résorbés début décembre 2010. Des améliorations compromises L’insuffisante révision des procé- dures et processus qui aurait dû accompagner le déploiement de Chorus compromet les améliorations de la gestion publique attendues du projet. Le choix stratégique opéré en 2006 consistait à s’appuyer sur un progiciel de gestion intégrée existant sur le marché, utilisé par d’autres grandes organisations et entreprises publiques et privées, ce qui nécessitait une refonte complète des processus de gestion pour pouvoir utiliser au maximum les capacités offertes par le nouvel outil. Cette refonte n’est pas allée jusqu’à son terme pour toutes les étapes de la dépense : - le suivi des engagements (c’est- à-dire des commandes passées par les services de l’Etat) n’est pas encore assuré ; - l’organisation de la chaîne de la dépense n’est pas encore efficace, notamment en matière de constatation du service fait (correct enregistrement _____________________________________ (1) Chorus assurera le paiement de toutes les dépenses de l’Etat, aux deux exceptions notables des dépenses de personnel et des dépenses fiscales.Chorus et les systèmes d’information financière de l’Etat Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes de la réception des biens ou services commandés) et de suivi des pièces justificatives, mais aussi d’adaptation des restitutions aux besoins des utilisateurs ; - le développement de la comptabilité générale subit des aléas, la conception de ce volet du projet ayant été tardive. Ces insuffisances ont des consé- quences directes sur la qualité des comptes de l’Etat. Des carences stratégiques dans les choix d’organisation Le choix initial de maintenir l’organisation comptable inchangée alors qu’une rationalisation était possible et nécessaire, l’absence de décisions en matière de comptabilité analytique, de comptes consolidés ou de fiabilité des données relatives au parc immobilier, constituent autant d’insuffisances. La gouvernance du projet demeure en question, les grandes orientations straté- giques du projet souffrant d’un manque de coordination interministérielle. Enfin, la Cour relève un manque de transparence et de maîtrise des coûts du projet. Si les coûts directs du projet sont évalués à 1 Md€ sur 10 ans par le ministère chargé du budget, ce chiffrage repose sur des bases fragiles, les scénarii prévisionnels sur lesquels il s’appuie devant être actualisés ; par ailleurs, des charges, de l’ordre de 500 M€, doivent être ajoutées à ce chiffrage, notamment pour ce qui concerne l’adaptation à Chorus des systèmes ministériels ou l’environnement de Chorus. Le coût total du projet pourrait atteindre 1,5 Md€ sur la période 2006-2015. 96Chorus et les systèmes d’information financière de l’Etat Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Recommandations clarifier la gouvernance du projet et l’articuler davantage avec celle des autres projets structurants (Copernic, opérateur national de paye, systèmes d’information logistiques) et favoriser l’émergence d’une stratégie interministérielle cohérente, appuyée par un soutien politique sur la durée ; faire des restitutions aux ordonnateurs un chantier prioritaire, pour redéfinir les outils de pilotage et de contrôle ; refondre le règlement général sur la comptabilité publique, en identifiant les filières hiérarchiques des nouvelles fonctions (centres de services partagés, services facturiers, unités opérationnelles, etc.) et les actes susceptibles de mettre en cause, dans la chaîne de la dépense et dans la chaîne de la recette et des dépenses fiscales, les responsabilités juridiques respectives des ordonnateurs et des comptables ; ramener, dans une première étape, le nombre de comptes de gestion à une quarantaine ; tenir une comptabilité des engagements auditable pour assurer le suivi des dettes de l’Etat vis-à-vis de ses fournisseurs ; développer les comptabilités auxiliaires et fiabiliser les données « basculées » dans Chorus, dans le but d’exploiter au maximum les possibilités offertes par le progiciel de gestion intégrée et pour en optimiser le retour sur investissement ; faire du développement d’une véritable comptabilité analytique à l’échelle de l’Etat une priorité de la révision générale des politiques publiques. 9742 Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) est un établissement public national chargé de missions liées à l’emploi et à la formation des agents territoriaux. La Cour avait mis en évidence, en 2002 et 2007, de nombreuses défaillances dans la gestion tant des personnels que de l’immobilier ou des véhicules. Un nouveau contrôle portant sur les exercices 2004 à 2009 a révélé la persistance de ces insuffisances. Le CNFPT a tenté d’assurer la qualité de sa gestion en mettant en place des instruments et procédures qui se sont voulus contraignants. Font encore défaut cependant une connaissance des emplois et fonctions des agents permettant d’adapter les organisations internes, une véritable politique d’achat au-delà de la simple formalisation des procé- dures, une maîtrise des frais de transport et de déplacement, à l’origine de nombreux gaspillages, ainsi qu’une comptabilité analytique. Les transformations profondes de la formation des agents territoriaux introduites par la loi du 19 février 2007 doivent conduire le CNFPT à adapter la configuration des écoles que cette loi a en grande partie périmé, à renforcer la collaboration avec les collectivités locales et à développer les coopérations avec les centres départementaux de gestion, les universités et les réseaux professionnels. Le budget annuel du CNFPT est d’environ 350 M€, alimenté pour l’essentiel par une cotisation obligatoire assise sur les traitements des fonctionnaires territoriaux. Ce caractère captif des recettes, en forte augmentation du fait de l’évolution des effectifs de ces fonctionnaires, a garanti au CNFPT une certaine aisance qui ne l’a pas conduit à maîtriser les coûts de ses activités. Un plan ambitieux d’investissements immobiliers de 150 M€ sur cinq ans, comprenant notamment l’acquisition dans Paris intra-muros d’un nouveau siège social d’un coût proche de 70 M€ a été adopté. Le CNFPT n’est cependant pas à même de justifier de tels investissements ainsi que leurs futurs coûts de maintenance par des études préalables. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 98 98 rénover l’offre de formation ; perfectionner les outils de gestion ; maîtriser les dépenses ; adapter le montant des cotisations aux activités et aus besoins qui en découlent, en abaissant leur taux, fixé à 1 % en 1987, au plafond prévu par la loi, et inchangé depuis. Recommandations99 Cour des comptes Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 43 Le Grand port maritime de Marseille : blocage social et déclin Premier port de France, le Grand port maritime de Marseille (GPMM) a fait l’objet d’une attention particulière de la Cour, qui avait souligné dans son rapport public thématique de juillet 2006 l’urgence de la réforme dans les ports français. Le GPMM n’a cessé de reculer dans la compétition internationale Il bénéficie pourtant de nombreux avantages comparatifs dans ses deux composantes, les bassins de Marseille à l’Est, le port de Fos à l’Ouest : une bonne situation sur la route maritime entre l’Asie à l’Europe ; un coût de passage raisonnable par rapport à ses principaux concurrents ; une grande facilité d’accès ; de vastes réserves foncière à Fos malgré les contraintes environnementales ; un réseau d’oléoducs à vocation européenne. Néanmoins, le port de Marseille a perdu des parts de marché dans presque tous les secteurs, n’obtenant un certain succès que dans le domaine des croisières. Il n’a pas su s’inscrire dans l’exceptionnel dynamisme du trafic des conteneurs et doit se contenter de la 27ème place européenne dans ce domaine. Il a accru sa dépendance à l’égard de la rente pétrolière, tout en cédant également des positions dans ce créneau. Une fiabilité compromise par d’incessants conflits sociaux Dans un paysage social dominé par un syndicat, des crises majeures, essentiellement autour de l’avenir de la manutention verticale, ont miné la vie du port dans les années récentes : 2005, 2007, 2008, 2009 et, tout récemment, octobre 2010. Ces crises, souvent marquées par des violences, ont détourné du port temporairement, voire définitivement, une partie du trafic. Certes, les relations sociales connaissent aujourd’hui une évolution quelque peu différenciée dans les deux parties du port : toujours bloquées et marquées par une forte hostilité à la réforme sur les quais marseillais et dans les bassins pétroliers, elles connaissent un début de dialogue autour de la réforme à Fos. L’image sociale renvoyée par le port à ses clients demeure cependant négative et pèse sur son avenir commercial. Le Grand port maritime de Marseille : blocage social et déclin Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Des réformes inabouties La réforme de 1992 de la manutention horizontale, assurée par les dockers, est inachevée : les deux bureaux centraux de la main d’œuvre (BCMO) restent actifs à Marseille et à Fos, alors qu’ils se sont éteints dans les autres ports ; plutôt que de recruter directement les dockers, les entreprises de manutention ont préféré recourir à des groupements d’employeurs, gérés avec le syndicat dominant. La productivité des dockers a décliné depuis 2007, sous l’effet d’un manque de réorganisation du travail, conjugué à une augmentation des effectifs, alors que les trafics reculaient. Quant au personnel de la manutention verticale, qui reste employé par le GPMM tant que la réforme de 2008 n’est pas effective, il bénéficie d’un régime de travail éloigné de celui des ports concurrents : équipes de deux portiqueurs par engin de levage au lieu d’équipes de trois pour deux engins, voire quatre pour trois ; taux d’utilisation des portiques moitié moindre. Pendant qu’un portiqueur conduit l’engin, l’autre reste à proximité, occupé à des tâches annexes ou en salle de repos. En définitive, le temps de conduite effectif d’un portiqueur est, par jour, de 3 heures 30 à Fos et de 3 h à Marseille, la durée hebdomadaire s’établissant respectivement à 14 heures et 12 heures. De surcroît, la Cour relève la persistance de « gratifications » irrégulières versées par les entreprises de manutention, alors qu’elles ont généralement disparu ailleurs en France. Une gestion des ressources humaines mal maitrisée Les dépenses de personnel pèsent de façon croissante sur les résultats. Malgré une inflexion en 2009, les objectifs du plan d’entreprise n’ont été respectés ni pour les effectifs ni pour la masse salariale, en forte hausse. Le « maquis » des primes a encore été étendu à la suite de la crise sociale de 2005, les heures de récupération n’ont pas été véritablement gérées, l’octroi des heures supplémentaires n’a pas connu toute la rigueur souhaitable et les dépenses d’action sociale ont été hors de proportion avec celles de ports français comparables. Quant à l’absentéisme, trop important, il s’est encore aggravé. Enfin, le nombre de journées perdues du fait des accidents de travail et de trajet a augmenté. 100Le Grand port maritime de Marseille : blocage social et déclin Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes  établir des indicateurs de la fiabilité, et organiser le débat autour d’eux, en y associant les divers acteurs, internes et externes, du Port ;  conduire à bien, sur les terminaux concernés, les transferts, prévus par la réforme portuaire, des outillages et de ceux qui les servent ;  encourager, dans le cadre de cette réforme, l’effort des opérateurs de terminaux pour conduire l’adaptation de la manutention aux standards internationaux ; mieux maîtriser la gestion des ressources humaines, en mettant notamment en œuvre les recommandations de la Cour accompagnant les analyses présentées ci-dessus ;  engager le Port dans une véritable démarche de performance, par des plans évolutifs, adaptés régulièrement. La Cour insiste, auprès des dirigeants du GPMM, mais aussi des tutelles ministérielles et des représentants locaux de l’Etat, pour qu’ils sanctionnent, ou fassent sanctionner, les dérives accompagnées de violences, notamment en portant plainte systé- matiquement. De façon générale, l’autorité de l’Etat doit s’exercer pleinement et avec constance pour que les réformes voulues par le législateur soient effectivement mises en œuvre, au GPPM comme ailleurs. Recommandations 10144 Les agences comptables des lycées et collèges publics Le rapport public annuel de 2008, avait souligné les défaillances de la gestion comptable des 2.600 lycées et des 5.200 collèges publics. La Cour avait constaté une mauvaise tenue de ces comptabilités en raison des insuffisances de l’organisation comptable. Elle avait relevé que les périmètres des agences comptables étaient très iné- gaux : à la rentrée 2006, 403 agences ne comptaient qu’un seul établissement, et environ 2.000 deux à quatre établissements. La Cour observait également que la réglementation comptable était obsolète. Une révision d’ensemble de l’organisation des agences comptables Chaque académie a été chargée de définir une nouvelle carte comptable, permettant de faire passer progressivement l’effectif moyen des établissements rattachés, à l’horizon 2012, de trois établissements à six établissements. Cette réorganisation doit s’accompagner d’une amélioration de la formation des agents comptables et des personnels, ainsi que d’un renforcement des équipes dans les agences les plus importantes. Ces orientations répondent en grande partie aux recommandations de la Cour. Celle-ci, toutefois, avait manifesté le souhait d’un regroupement plus accentué des agences comptables. En outre, la séparation des fonctions d’agent comptable et d’ordonnateur au sein des établissements d’enseignement scolaire n’a pas encore été engagée par le ministère. L’adoption d’une instruction comptable actualisée et simplifiée Une réforme du cadre budgétaire et comptable des collèges et lycées a été engagée. Cette réforme, qui devrait être totalement mise en œuvre en 2013, pré- voit une simplification et une meilleure lisibilité du budget, afin de mieux rendre compte de la globalisation croissante des crédits. Par ailleurs, le budget sera désormais élaboré en tenant compte du projet d’établissement et du contrat d’objectifs conclu avec l’autorité acadé- mique. Ces orientations répondent en grande partie aux recommandations de la Cour. Les juridictions financières s’assureront toutefois que la mise en œuvre de ce nouveau cadre budgétaire et comptable permettra une évolution des établissements scolaires vers une plus grande autonomie et vers un pilotage par les résultats conforme aux orientations de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Cour des comptes Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 102 102103 Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes 45 L’Etablissement public d’insertion de la défense (EPIDe) Une création improvisée Dans un référé adressé en février 2008 à la ministre de l’économie, des finances et de l’emploi et au ministre de la défense, la Cour avait relevé que cet établissement, destiné à l’insertion sociale et professionnelle de jeunes en très grande difficulté, avait été créé en 2005 dans l’improvisation, en méconnaissance des règles de bonne gestion, et n’avait que des résultats faibles pour un coût élevé. Elle recommandait un réexamen de l’ensemble du dispositif. Après un nouveau contrôle, la Cour constate que, malgré quelques remises en ordre, l’Etat ne s’est toujours pas mis en situation de réussir l’objectif d’insertion des jeunes en déshérence qu’il s’était fixé. Il a fallu attendre 2009 pour que l’EPIDe soit doté d’un contrat d’objectifs et de moyens (COM), qui commence enfin à clarifier son positionnement et à mieux asseoir son fonctionnement. Des coûts d’accueil restés élevés L’établissement n’accueille que 2 000 « volontaires pour l’insertion », loin de l’ambition initiale de 20 000, dans 20 internats, trop souvent situés en zone rurale, loin des possibilités d’emploi. Un montage immobilier complexe et très déséquilibré impose à l’établissement des engagements sur 25 ans, qui rendent malaisé un redéploiement. Le coût de l’accueil d’un jeune apparaît élevé (40 000 € par an), sans que les résultats en termes d’insertion durable dans l’emploi semblent significativement meilleurs que dans d’autres dispositifs beaucoup moins onéreux. La démarche d’évaluation prévue par le COM a pris deux ans de retard et ne permet pas de vérifier que l’EPIDe accueille réellement les jeunes les plus en difficulté et contribue efficacement à leur insertion. La Cour préconise le gel des dispositions du COM – en particulier de tous ses aspects budgétaires et financiers – tant que les ministères de tutelle ne disposeront pas des résultats de cette évaluation afin de pouvoir décider en connaissance de cause de la poursuite ou de la dissolution de l’EPIDe. Cour des comptes46 La participation de la France aux corps militaires européens permanents La France participe à huit corps militaires européens permanents de nature et d’importance très variables : le plus ancien et le plus structuré est la brigade franco-allemande. On peut également citer l’Eurocorps, des forces maritimes, et, plus récemment, des forces de transport aérien et une force de gendarmerie. Des blocages persistants Symboles de la construction européenne et préfiguration de l’avenir, ces unités doivent faire face à de multiples dysfonctionnements, signalés par la Cour depuis 2003 Des contentieux, notamment fiscaux, ont bloqué pendant des années (17 ans dans le cas de l’Eurocorps) la mise en œuvre des accords internationaux nécessaires au bon fonctionnement de certains de ces corps. La gestion opérationnelle de ces unités est quotidiennement entravée par la règle de l’unanimité qui les gouverne, s’agissant d’entités internationales, là où d’autres formules, plus souples, auraient pu être envisagées. La période récente, marquée par l’accroissement du nombre des participants et par la création de nouveaux corps, s’est traduite par une dégradation de cette situation, hormis pour le domaine aérien qui a enregistré quelques progrès. La Cour s’était également inquiétée de la sous-utilisation manifeste de ces unités dans les opérations internationales, alors que l’ambition qui avait pré- sidé à leur création aurait dû conduire à une visibilité et donc à une mobilisation importantes. La situation n’a pas évolué depuis l’origine et rien ne laisse prévoir une amélioration dans l’avenir. La nécessité d’une réflexion plus globale La création de chacune de ces unités a répondu à une situation particulière et à des préoccupations purement nationales : pour remédier au caractère disparate et à l’absence d’articulations de ces différentes forces entre elles, constatés par la Cour dès l’origine, une adaptation de ces forces aux développements récents de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) aurait pu être envisagée. Ces constats, dont la France ne saurait être tenue, loin de là, pour seule responsable, devraient être à l’origine d’une réflexion structurelle d’ensemble, dans une perspective de refonte et de réorganisation, voire de suppression. Synthèses du Rapport public annuel de la Cour des comptes Cour des comptes 104